L’un des thèmes phare de l’actuelle campagne électorale présidentielle française, comme américaine d’ailleurs, repose sur la réindustrialisation des territoires du monde occidental. Facile à dire, autrement plus délicat à appréhender. L’Allemagne qui a fait l’effort de soutenir ces ETI (Entreprises de Taille Intermédiaire) a su échapper à l’inexorable déclin industriel qui frappe en revanche l’Hexagone de plein fouet. Rendez-vous compte la France a perdu 600 000 emplois industriels ces dix dernières années ! Une saignée difficile à enrayer !
Pas étonnant donc de voir un gouvernement quémander des compensations industrielles lorsqu’un marché se développe autour de subventions publiques ou d’efforts de la collectivité au travers la CSPE. C’est ainsi que le gouvernement Fillon n’a eu de cesse d’en appeler à la création d’une filière industrielle amont lors du développement du marché solaire photovoltaïque français. Mais ce préalable était-il une raison suffisante pour remettre tout en cause, pour disloquer la filière aval qui avait créé plus de 20 000 emplois en France.
D’autant que la statistique est aujourd’hui implacable. Dans un projet solaire photovoltaïque, sur dix emplois générés, un seul est dédié à la fabrication des cellules. Les emplois du solaire photovoltaïque se retrouvent aujourd’hui très majoritairement dans le montage des modules réalisé en France, dans les études, dans les installations et les systèmes d’intégration au bâti, le suivi et la maintenance, le financement et les assurances. Autant de services pour l’essentiel non délocalisables qui créent de l’activité.
Imposer par l’action politique la création d’une filière industrielle à tout prix n’a pas de sens et ne résiste pas à l’analyse. Et pour preuve, l’industrie solaire occidentale, même la plus performante, ne s’en sort pas. Le groupe allemand Q-cells, leader mondial créé en 1989, a annoncé mardi 24 janvier être dans une situation financière critique. L’entreprise délocalise massivement sa production en Malaisie au détriment de ses capacités de production en Allemagne. Le norvégien REC, également lourdement déficitaire, envisage de fermer la moitié de ses lignes de production norvégiennes pour concentrer ses activités dans les pays à bas coût, via son usine à Singapour. La société américaine Solyndra s’est déclarée fin 2011 en faillite et a licencié 1 100 personnes. Et pendant ce temps, dans ce contexte plus que tendu, Photowatt attend un repreneur
Et pourtant, toute velléité industrielle n’est pas envolée. Et le solaire pourrait même donner l’exemple en France, l’exemple de ne pas opposer systématiquement dans l’industrie grand groupe et PME mais plutôt de cristalliser les complémentarités. Certes Total a acheté l’américain Sunpower. Mais Total compte s’appuyer sur Tenesol, quatre cents emplois en France, et sur un savoir-faire off grid unique au monde. Sans oublier la construction d’une nouvelle usine d’assemblage de modules en Moselle avec quatre-vingt emplois à la clé. Avec l’espoir tout de même que Total ne fera pas comme BP qui vient d’abandonner tout son secteur d’activité solaire. L’espoir, un habit de lumière dans l’ombre du chagrin !