Reportage/Voltec Solar fait de la résistance

Le fabricant alsacien de modules solaires Voltec Solar poursuit ses activités et résiste, plutôt bien, au rouleau compresseur solaire chinois responsable de l’hécatombe d’une foule innombrable d’industriels européens du solaire. Par sa flexibilité et sa capacité d’innovation ! Décryptage.

 

Courant juin, nous avions croisé Lucas Weiss directeur général de Voltec Solar dans les allées du salon Intersolar de Munich. Le temps d’une discussion instructive consacrée à l’analyse du marché du photovoltaïque mondial ! Deux mois avant cette rencontre en avril, Systovi, l’un des derniers concurrents français de Voltec Solar, venait de déposer le bilan. C’était quelques jours seulement après la divulgation par Bruno Le Maire à Manosque d’un « plan de bataille » pour la sauvegarde du solaire Made in France. Une défaillance qui faisait tache face au volontarisme politique affiché en Provence ! Voltec Solar avait bien compris alors que son salut ne viendrait pas d’une hypothétique aide de l’Etat mais bien d’une stratégie industrielle et commerciale sans fausse note sous peine de sombrer.

 

Des prix de modules divisés par 2

 

Comme l’ensemble de l’industrie photovoltaïque, Voltec Solar a dû faire face à une crise de surproduction de modules qui a eu pour effet une drastique baisse des prix. « Les tarifs ont été divisés environ par deux dans les indices

tarifaires en quelques mois » explique Lucas Weiss, le directeur général de Voltec Solar. « Nous venions d’investir 9 millions d’euros dans une nouvelle ligne pour doubler notre capacité de production de 250 à 500 MW soit près de 15% du marché français. A l’automne 2023, nous avons réduit la cadence en 2×8 et suspendu notre plan d’embauche. Histoire de faire le dos rond ! » poursuit le DG de Voltec Solar dont les concurrents chinois affichent des capacités de production de plusieurs dizaines de GW. Dans ce contexte, les effets d’échelle sont colossaux. Rien que sur le verre, les géants chinois disposent de tarifs plus de trois fois inférieurs aux usines européennes. On mesure la portée du challenge.

 

L’atout de la flexibilité

 

Voltec Solar a su justement relever le défi en jouant sur sa grande flexibilité apanage des PME versus grands groupes et sur la force commerciale de la marque française sans pour autant pouvoir y accoler le label Made in France. « Nous mettons ainsi l’accent sur notre démarche d’écoconception. Nous achetons depuis sept ans nos wafers au norvégien NorSun, et faisons avec fabriquer nos cellules en Asie. Mais 80% de la valeur de nos panneaux provient d’Europe » précise Michaël Godet, le directeur commercial de l’entreprise qui confirme l’attrait des clients pour des produits issus d’une PME française. La faculté de Voltec Solar à s’adapter très vite aux demandes spécifiques du marché a ainsi permis à l’entreprise de passer la crise. Le marché résidentiel, qui représente désormais 50% de ses ventes, pèse davantage dans la balance et les distributeurs et installateurs disposent d’arguments pour commercialiser les modules alsaciens : des panneaux volontiers esthétiques dotés de verre sans antimoine recyclable, en verre alimentaire, ou encore des modules colorés qui ont su trouver leur marché. Résultat : le carnet de commande de l’entreprise a été multiplié par 5 et il est supérieur en nombre de pièces à celui de 2022. La production est repassée en 3×8 et quelques dizaines d’embauches sont prévues pour fin 2025.    

 

L’innovation pour pérenniser l’activité

 

Outre la flexibilité et pour durer, Voltec Solar fait le pari de l’indispensable innnovation. Où l’on apprend de Lucas Weiss dans l’Usine Nouvelle que Voltec vient de réaliser un nouvel investissement de 1 million d’euros pour lancer la production d’une nouvelle génération de panneaux avec la technologie TOPCon « qui participe à la baisse des prix » et donc à la compétitivité du fabricant français. Le rendement des panneaux passe à 22,5 à 23%, contre 20 à 21% avec l’ancienne technologie. « La puissance des modules monte ainsi à 455 W pour la partie tertiaire et à 500 W pour la gamme résidentielle sur une même surface. Là où, pour un kit de 3 kW on avait besoin de sept à huit panneaux, aujourd’hui, il n’en faut plus que six », indique Michaël Godet. Et la quête d’innovation ne s’arrête pas là. L’entreprise investit aussi dans l’industrialisation d’une nouvelle technologie, le Perovskite 4T avec l’institut français du photovoltaïque, l’IPVF, à Saclay. Sous l’égide d’un financement de France 2030, une ligne pilote va être mise en service lors du deuxième semestre 2024. Un démonstrateur industriel devrait suivre dans les deux ans. « Disposer de la propriété intellectuelle d’une technologie est la clé pour assurer la souveraineté de la France face aux panneaux chinois », conclut Lucas Weiss à la tête d’une PME résiliente et résistante face aux majors chinoises. Le village gaulois du solaire n’est pas en Armorique, il se situe en Alsace…

youtu.be/tSOeDzE6wHE

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