Le ministre allemand de l’économie et de la protection du climat, Peter Altmaier, veut réformer l’EEG (loi sur le développement des renouvelables) pour accélérer l’expansion de l’électricité verte et ainsi lutter plus efficacement contre les changements climatiques. Sur le sujet, l’Allemagne ne désarme pas et désire s’employer à redonner confiance aux jeunes générations qui ont des attentes fortes sur cette thématique. Néanmoins, il juge irréaliste d’atteindre la neutralité climatique avant 2050.Â
L’interview donnée au journal Taz par Peter Altmaier, ministre de l’économie et de la protection du climat allemand est riche d’enseignements. Lucide et pragmatique. Tout commence par une prise de conscience. Un constat. « J’avoue que ce que nous avons convenu jusqu’à présent n’est pas suffisant pour devenir climatiquement neutre d’ici 2050. La confiance, en particulier parmi la jeune génération, ne se fera que par des actions concrètes.  C’est pourquoi je ferai des suggestions sur ce que nous devons changer. Un élément de la mosaïque est l’amendement EEG, avec lequel nous accélérons considérablement l’expansion de l’électricité verte. Nous développerons beaucoup plus de photovoltaïque et d’énergie éolienne en mer et sur terre que ce qui avait été précédemment déterminé » admet le ministre dans un élan très volontariste.
100 gigawatts de photovoltaïque en 2030
Très concrètement, cela veut dire que l’Allemagne compte aller au-delà des résolutions du programme de protection du climat 2030, adopté l’automne dernier. « Par exemple, avec le photovoltaïque, nous prévoyons 100 gigawatts en 2030, plus que les 98 gigawatts prévus dans le plan de protection du climat. C’est presque le double de la capacité actuellement installée » précise Peter Altamaier. Le nouvel objectif demeure cependant mesuré. Il suppose que la consommation d’électricité augmentera dans certains secteurs, par exemple en raison de l’électromobilité, mais diminuera dans d’autres – par exemple en raison d’une plus grande efficacité énergétique. « Si les choses tournent différemment, l’expansion doit bien sûr être ajustée à la hausse en conséquence » rétorque Peter Altmaier.
Stipuler dans l’EGG que les petits systèmes PV peuvent continuer à alimenter le réseau
Reste que les millésimes 2020 et 2021des EnR ne devraient pas être de grands crus. Et Peter Altmaier de s’en expliquer : « La coalition rouge-verte a décidé en 2000 de limiter le financement à 20 ans. L’idée était et est de remplacer les systèmes amortis par des systèmes plus efficaces. Cela est particulièrement vrai pour les éoliennes, où le «repowering» conduit à un rendement électrique beaucoup plus élevé. Il y a des cas, en particulier avec les exploitants de très petits systèmes solaires, où cela n’est pas possible. C’est pourquoi nous voulons maintenant stipuler dans l’EEG que ces petits systèmes photovoltaïques peuvent continuer à alimenter leur réseau électrique même après la fin de la subvention et recevoir cette rémunération au prix du marché ». D’autres stimulii existent. L’industrie par exemple. « Malgré la pandémie de la Covid-19, nous nous sommes engagés à atteindre les objectifs climatiques et ne les avons pas réduits. Et avec l’engagement pour la neutralité climatique en 2050, l’expansion des énergies renouvelables s’est également vu accorder une toute nouvelle priorité dans l’économie. L’industrie a également besoin d’électricité verte, car c’est le seul moyen de parvenir à la transition vers la neutralité climatique, par exemple lors de la conversion de la production d’acier en acier vert » poursuit le ministre.
Réduire la fiscalité sur les EnR
Et inutile de dire qu’en Allemagne, les politiques attachent une grande importance au maintien de la base industrielle du pays. « Pour cela, nous avons besoin d’électricité 100% renouvelable d’ici 2050. Et pour que le tout reste abordable, nous avons décidé dans le cadre du programme de relance économique de stabiliser la surtaxe EEG des recettes fiscales et même de la réduire progressivement au cours des prochaines années » affirme le ministre. L’Allemagne a plus que doublé la part de l’électricité renouvelable en une décennie de 21 à plus de 50%. Aujourd’hui, elle resserre l’objectif 2050 pour les énergies renouvelables pour la première fois depuis plus d’une décennie. En Allemagne, la fin de l’utilisation du charbon a été fixée de 2035 à 2038. Mais il peut y avoir ici une dynamique de marché qui accélère ce processus. Même avant la crise sanitaire, la production d’électricité au charbon avait fortement chuté. « Mais si le marché force une sortie plus rapide, nous ne nous y opposerons pas » stipule Peter Altamaier. Et à ceux qui le vilipendent et le taxent de pas aller encore assez vite pour la sauvegarde du climat, il fait preuve de pragmatisme pour conclure : « Atteindre la neutralité des gaz à effet de serre à l’échelle de l’UE d’ici 2050 serait révolutionnaire dans le monde entier et sera déjà assez difficile. Exiger maintenant de devenir climatiquement neutre dès 2040 ou même plus tôt, je ne considère pas sérieusement représentable à ce stade ».
Encadré
Quid de Peter Altmaier ?
Agé de 62 ans, Sarre est membre de la CDU du Bundestag depuis 26 ans. En tant que ministre fédéral de l’Économie et auparavant ministre de l’Environnement et de la Chancellerie, il est responsable de la politique climatique allemande depuis de nombreuses années. Il est régulièrement critiqué par les militants du climat pour cela.