Pour lutter contre l’imposition de droits de douane sur les produits solaires aux Etats-Unis puis en Europe, les fabricants chinois ont constitué des associations : ils se sont réunis au sein de la Coalition pour une Energie Solaire Abordable (CASE) aux Etats-Unis et, en Europe, au sein de l’Alliance pour une Energie Solaire Abordable (AFASE). Ces deux associations ont commandé des études d’impact « indépendantes ». En janvier 2012, le Brattle Group réalise, pour le compte de la CASE, une étude sur le marché américain intitulée l’« Impact sur l’emploi des droits de douane proposés pour les cellules et modules photovoltaïques chinois ». En février 2013, l’AFASE présente une étude pour le marché européen. Réalisée par Prognos, elle s’intitule « L’impact des mesures anti-dumping et/ou compensatrices sur les importations chinoises de modules, cellules et wafers sur l’emploi et la valeur-ajoutée ».
Selon l’étude américaine du Brattle Group, des droits de douane de 100% ou 50% sur les modules importés détruiraient respectivement 50 000 ou 43 000 emplois aux Etats-Unis dans les trois années suivant leur mise en place. Ces suppressions seraient dues à une forte augmentation des prix des produits solaires.Selon l’étude européenne menée par Prognos, des droits de 20%, 35% ou 60% sur les modules importés entraineraient la suppression de 175 500, 244 100 ou 242 000 emplois dans les trois prochaines années. Comme aux Etats-Unis, ces pertes d’emplois seraient liées à l’augmentation du prix des produits solaires. Le retour d’expérience des USA nous permet de tirer des premières conclusions sur l’impact de la mise en place de tarifs douaniers. Au total, on y observe un fort recul des importations bénéficiant de mesures de dumping et un faible impact sur les prix et sur l’emploi puisque le marché continue à croitre.
Des faits aux USA qui remettent en cause ces études
I. Impacts des droits de douane sur les importations chinoises aux Etats-Unis
Des droits de douanes préliminaires ont été introduits aux Etats-Unis en mars et en mai 2012 (mesures de compensation suivies de droits anti-dumping). La décision finale a été prise en novembre 2012. Les droits vont de 24% à 250%. Les importations chinoises aux Etats-Unis ont alors fortement diminuées suite à la mise en place de droits de douane rétroactifs en mars 2012. La valeur totale des importations chinoises de cellules et modules était, en décembre 2012, de $20,7 millions, alors qu’elle était de $50,5 millions en novembre 2012 et de $412 millions en décembre 2011, soit une baisse en valeur de 95% des importations chinoises par rapport à la même période l’année précédente (période de pic des importations). Si l’on ne tient pas compte de la période de pic des importations, on note que leur valeur diminue tout de même de 70% par rapport à mars 2012.
II. Impact des droits de douane sur les prix américains
Selon les études américaine et européenne commandées par la CASE et l’AFASE, les droits de douanes se traduisent systématiquement par une augmentation des prix. En réalité, depuis l’introduction de droits de douane, les prix des modules fabriqués aux Etats-Unis ou importés depuis le Reste du Monde ou la Chine sont restés stables ou ont légèrement diminués. La baisse rapide et incontrôlée des prix a été stoppée et les prix des produits photovoltaïques aux Etats-Unis sont sujets au mécanisme naturel et durable du marché.
EU ProSun pense que cette évolution sera identique en Europe : l’introduction de droits de douane, qui permettra de maintenir une forte concurrence internationale et européenne, entrainera un maintien des prix ou les fera baisser. Le dumping chinois ne conduit qu’à éliminer du marché les concurrents internationaux tandis que les prix fixés dans le cadre de ce système ne sont pas viables.
III. Impact des droits de douane sur l’emploi américain
Selon l’Association Européenne de l’Industrie Photovoltaïque (EPIA) : la fabrication de modules photovoltaïques génère, en fonction de la technologie utilisée, 3 à 7 emplois directs dans les zones de production et entre 12 et 20 emplois indirects par mégawatt produit. Les autres emplois sont créés dans les secteurs des services au consommateur et sont liés à l’installation du système photovoltaïque : couvreurs, électriciens, employés et postes supports (ingénieurs, administration, restauration, fonctionnaires, etc.). Par conséquent, le nombre d’emplois et de nouvelles installations sont étroitement liés.
Les études américaine et européenne sur l’impact des droits de douanes mandatées par la CASE et l’AFASE, prévoient que les droits de douane conduiront inévitablement à une forte augmentation des prix, ce qui entrainera une baisse du nombre d’installations et donc des emplois. Or, selon le SEIA (Solar Energy Industries Association), association des industries du solaire sur le marché national américain, le nombre d’installations aux Etats-Unis a continué à augmenter suite à l’imposition des droits de douane : +36% au 3ème trimestre 2012 par rapport au 3ème trimestre 2011. Le 4ème trimestre 2012 devrait enregistrer une croissance record.
L’étude de la Banque Sarasin confirme cette tendance et prévoit une croissance du nombre de nouvelles installations solaires aux Etats-Unis de 54% dans les six prochaines années. Enfin, le SEIA confirme que le « nombre d’emplois du secteur de l’industrie solaire s’est accru de 13,2% au cours de la seule année dernière [2012], et a doublé ces trois dernières années »
Conclusion : Les droits de douane anti-dumping ont peu d’impact sur les marchés locaux
Les Etats-Unis ont été les premiers à mettre en place des droits de douane sur les importations chinoises de produits solaires. Depuis l’introduction de ces mesures, et au contraire de ce que affirme les études commanditées par les associations pro-chinoises, le marché a continué à se développer. On observe que malgré l’introduction des droits de douane, la croissance des installations photovoltaïques s’est poursuivie et qu’il n’y a pas eu de répercussion sur les prix et les d’emplois.
EU ProSun est convaincu que seule une concurrence équitable bénéfice aux installateurs mais aussi aux fournisseurs situés en amont de la filière. En effet, pour maintenir les emplois, il est crucial qu’au lieu d’un monopole chinois qui élimine les entreprises en pratiquant des prix qui ne sont pas viables, il existe une diversité de producteurs assurant des débouchés pour les matériaux proposés par ces acteurs. C’est d’autant plus important que la Chine prévoit dans son plan quinquennal de devenir pleinement indépendante des importations de matières premières nécessaires à sa filière, mettant en péril les industries européennes qui se trouvent en amont (silicone, verre solaire, inverseurs, câbles, machines, etc) de la filière.
Au total, l’hypothèse selon laquelle les emplois européens dépendent du dumping chinois est non seulement déraisonnable mais elle est fausse ; ils dépendent de la bonne santé de l’industrie solaire en général, qui dépend à son tour d’une concurrence équitable et d’une variété de fournisseurs sur le marché permettant de maintenir des prix concurrentiels et une meilleure qualité au consommateur final.