Olivier Monié est directeur d’Omexom, la marque de VINCI Energies spécialiste du Power and Grid qui opère sur l’ensemble de la filière, de la production et de l’acheminement de l’électricité au compteur. Si l’histoire d’Omexom est intimement liée au transport, sa part d’activité dans les renouvelables et notamment dans le solaire ne cesse de croître. Une diversification qui va de pair avec une recherche permanente de valeur ajoutée dans l’application des technologies solaires. Une interview pleine de sens d’Olivier Monié, spécialiste multi-énergies, à l’heure de la transition énergétique !
Plein Soleil : Pouvez-vous en quelques mots nous détailler les activités d’Omexom, leader européen dans le monde de l’énergie ?
Olivier Monié : Nous intervenons dans trois grands domaines. La production d’électricité – 10% de notre CA – le transport avec les postes et les lignes HT – 30% de notre CA – et enfin la distribution qui pèse environ 60% du CA. Près de la moitié de l’énergie produite par nos clients est d’origine renouvelable, hydraulique pour l’essentiel. Seulement 5% produisent à partir de solaire photovoltaïque et d’éolien. On voit là qu’il existe une grande marge de progression et nous y attachons une attention toute particulière. C’est un fait, les énergies renouvelables représentent un axe fort de notre développement dans tous les pays. Parce qu’elles sont en général produites localement, les énergies renouvelables contribuent à la sécurité d’approvisionnement, leur prix s’avère de plus en plus compétitif, et elles répondent au besoin de décarbonation de la filière.
PS : Dans ce contexte, quels sont les domaines d’intervention d’Omexom ?
OM : Nous opérons sur trois grands métiers : le design, qui consiste à concevoir les études des projets sur lesquels nous sommes mandatés. Ensuite le built, qui correspond à la partie construction. Puis enfin le maintain, la maintenance jusqu’à l’exploitation. Un exemple concret : depuis la mi-mars et après une étude complète, nous construisons une centrale de 20 MWc au nord du Sénégal. Nous avons obtenu ce contrat d’un investisseur privé engagé auprès de SENELEC pour produire de l’électricité. Cette centrale sera achevée en fin d’année.
PS : Vous me parlez du Sénégal, mais quid de la France ?
OM : Le marché français a connu un bon démarrage il y a une dizaine d’années grâce à une réglementation favorable, puis le marché s’est brutalement écroulé avec une remise à niveau des tarifs d’achat et la quasi disparition des appels d’offres. Aujourd’hui l’état propose une meilleure visibilité sur les projets mais les prix se sont écroulés. Nous avons développé nos activités à l’étranger et plus spécifiquement en Afrique de l’Ouest subsaharienne où des projets existent et les financements sont là notamment avec l’aide de l’AFD.
En phase de consultations pour l’AO CRE3
PS : Les volumes engendrés par le l’AO CRE3 ne vont-ils pas vous faire revenir un peu en France ?
OM : Assurément. Nous sommes d’ailleurs en train de répondre à des investisseurs. Nous sommes en phase de consultations et de négociations pour consolider notre présence dans ce marché concurrentiel. Le marché français est arrivé à maturité, et naturellement les investisseurs ont intégré de plus en plus de valeur ajoutée et ne nous proposent plus que des prestations de montage et raccordement des équipements. Les coûts de la main d’Å“uvre sont donc un élément déterminant de nos offres et notre choix de travailler avec des entreprises locales doit faire face à une concurrence utilisant de la main d’Å“uvre étrangère détachée.
PS : Comment alors justement parvenez-vous à tirer votre épingle du jeu comme vous le dîtes ?
OM : Nous nous positionnons sur des prestations à plus forte valeur ajoutée, sur des sujets où s’exerce notre capacité d’ingénierie dans le service à apporter à nos clients. Nous avons développé une expertise pour accroître la performance des centrales solaires en nous appuyant sur différentes approches technologiques. C’est le cas de la technologie des trackers via un partenariat avec Exosun. Ces installations demandent un savoir-faire et du personnel qualifié pour une mise en Å“uvre. Le stockage associé à la production photovoltaïque est une technologie qui permet une meilleure régulation et l’énergie injectée sur les réseaux, et donc de rendre cette production plus acceptable par les réseaux. Enfin, nous étudions la possibilité d’utiliser une tension de 1500V en remplacement du 1000V afin d’augmenter le rendement intrinsèque des centrales PV. La maîtrise de ces technologies est indispensable pour continuer à exister dans le monde du solaire. Il s’agit là pour nous d’importants leviers de croissance.
Gestion locale de l’énergie et micro-grids
PS : Que pensez-vous de l’autoconsommation solaire à l’échelle industrielle ?
OM : C’est un marché que nous observons et sur lequel nous nous positionnons, notamment en Allemagne où il commence vraiment à se développer avec un prix de l’électricité 35% plus élevé qu’en France. Nous nous intéressons également à la gestion locale de l’énergie, aux micro-grids avec PV et batteries raccordés aux réseaux. Nous lançons des expérimentations dans des pays dotés de grandes zones désertiques comme l’Australie au sein desquelles le réseau n’existe pas. Ces ilots de consommation locale avec PV + batteries sont de plus en plus économiquement intéressants et supportables.
PS : Un mot, pour finir, sur le raccordement du solaire à la colonne montante dans le collectif ?
OM : Le solaire produit en France est dans sa très grande majorité consommé via les réseaux de distribution d’ERDF et passe donc dans les colonnes montantes. Si votre question est relative à l’autoconsommation, on est encore loin dans l’habitat collectif. Imaginer que les réseaux publics de distribution d’électricité deviennent le secours d’une production locale pose d’autre part la question du financement de ces réseaux qui se fait via la facture d’électricité. Les technologies, la réglementation et les modes de financement doivent évoluer pour arriver à cette possibilité.
Encadré
Omexom en quelques chiffres
La marque Omexom intègre 250 entreprises dans quarante pays sur tous les continents à l’exception de l’Amérique du Nord. Elle emploie 12 000 personnes pour un CA de 2 milliards d’euros.
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