Négociations/Comment va se jouer l’avenir du solaire photovoltaïque français dans les prochaines semaines ?

Le gouvernement a lancé il y a quelques semaines une consultation de soutien à la filière photovoltaïque à base de questions fortement orientées en direction de la maîtrise des dépenses publiques sous pression de la dette et des déficits.  Quatre items sont passés au crible : la ventilation de la PPE, la refonte du S21, l’avenir du segment 100-500 kW et enfin la place de l’industrie française sur ce marché. Quels sont les chemins à emprunter pour un futur soutenable et désirable de la filière ?

 

Le déficit n’attend pas. L’urgence de faire de substantielles économies sonne à la porte de Bercy. Pour cette consultation de soutien à la filière photovoltaïque française, le gouvernement attendait des propositions avant la période de Noël. Trop court pour les acteurs et syndicats du secteur qui ont finalement obtenu un délai avec une remise des propositions en deux temps, le 8 janvier pour trois des items et le 27 janvier pour l’avenir du segment 100-500 kWc.

 

Bercy apprécie les Appels d’Offres

 

Les négociations sont donc ouvertes entre le ministère et les professionnels du photovoltaïque. Et elles s’annoncent plutôt tendues. Aujourd’hui, autant le dire, le gouvernement est dans le flou total. Le ministère reporte rendez-vous sur rendez-vous. Cependant, une tendance forte se dessine. Pour Bercy, la maîtrise de la CSPE (Contribution au Service Public de l’électricité) et le contrôle des volumes des MW installés est la priorité des priorités. Le ministère de l’Economie et des Finances ne s’en cache pas. Il ne jure que par le mécanisme très « pratique » pour lui des appels d’offres qui permettent de réguler et donc de limiter à sa guise le développement du photovoltaïque. La bulle de 2010 et le moratoire qui a suivi ont laissé des traces. Pour les AO, OK avec les grandes puissances ! Mais supprimer le guichet ouvert sur le 100-500 kWc a-t-il du sens ? « Comment gérer un mécanisme d’appels d’offres sur le segment 100-500 kW alors que l’on compte à l’heure actuelle près de 2000 projets par trimestre ? Irréaliste ! » lance un expert du secteur.

Vers un durcissement du S21 ?

En 2024, sur le guichet ouvert 100-500 kWc, environ 4GW de projets ont été déposés là où le ministère a fixé la barre à 1,2 GW. A ce rythme, la tentation est grande de piloter les tarifs par les volumes. Pour autant l’idée n’a rien de réjouissant. Aujourd’hui, sous l’effet du coefficient d’indexation K basé sur l’inflation, les tarifs d’achat S21 sur le segment 100-500 kWc sont déjà inférieurs à ceux des AO Bâtiments qui jouissent d’économies d’échelles plus conséquentes. Cette incongruité prête à réflexion. Les tarifs d’achat S21 doivent demeurer raisonnablement attractif avec une stabilité relative et un lissage indispensable des projets. Sans quoi la pérennité de la filière serait en péril. Un chiffre : 1 GW représente environ 17 000 équivalents temps pleins. Il faut savoir qu’aujourd’hui, plus de 400 000 exploitations agricoles peuvent encore être équipées en solaire. « Si dans ce cadre, le guichet ouvert semble être la bonne solution pour le 100-500 kWc versus les AO aux volumes restrictifs et au timing dilatoire, un durcissement de ce guichet pourrait être envisagé autour de quelques pistes comme des garanties financières en amont ou des délais plus resserrés dans la réalisation des installations sous peine de perte du tarif afin d’encadrer les projets les plus matures pour plus de visibilité » ajoute une spécialiste reconnue de la filière. La négociation est ouverte avec pour objectif de bannir à tous jamais les stops and go mortifères. La suppression pure et simple du S21 en serait un !

Incitation aux projets hybrides PV+stockage sur le S21

Autre piste pour faire baisser la facture solaire, et celle-ci n’a rien d’insurmontable : la simplification des procédures de raccordement attendue de tous pour une vraie accélération du marché. L’obligation de la déconnexion à distance lors des périodes de prix négatifs avec une compensation à 50% pour les producteurs pourrait également représenter une source d’économies. Des coupures qui ne devront pas affecter les auto-consommateurs ! Parmi les solutions à explorer toujours dans l’optique de limiter les impacts économiques des prix négatifs, les propositions de mise en place d’incitations aux projets hybrides avec du stockage sur le segment S21 font sens. Une façon de développer la flexibilité et de lisser la production photovoltaïque ! Quelques freins réglementaires sont encore à régler mais l’idée pourrait faire son chemin. Dernier point, le NZIA (Net-Zero Industry Act) et ses 40% de modules d’origine européenne pour les projets solaires. « En faire une ambition oui, une obligation non. La filière soutient l’émergence d’une industrie nationale via des bonus environnementaux. Mais la résilience des projets, c’est aussi refuser de se couper de toutes alternatives chinoises à très forte compétitivité. Pour respecter nos objectifs bas-carbone et ne pas freiner notre marché, il faut une stratégie réaliste, respectueuse des acteurs de terrain » conclut un développeur mis sous pression par les incertitudes actuelles. Dans une quête de compétitivité économique et une volonté politique de maîtrise des dépenses publiques !

Encadré

Quelle place pour le PV dans la PPE ?

Les places sont chères au sein de la PPE. Dans la ventilation du solaire photovoltaïque, difficile à chaque segment de marché de trouver de la place dans la fourchette des 5,5 à 7 GW/an affichée par le ministère. Pour ne léser aucune des composantes de ce secteur d’activité, professionnels de petites ou grandes installations, (résidentiel, sol, ombrières, toitures, agrivoltaïque etc), Enerplan, syndicat des professionnels du solaire a sorti la calculette. Résultat : un minimum de 8,4 GW annuel permet de préserver l’ensemble des acteurs du secteur et leurs emplois induits.

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