Mardi 28 avril 2020, les sénateurs de la commission des affaires économiques du Sénat ont auditionné en visioconférence Julien Blanchet, rapporteur général de la Convention citoyenne pour le climat, sur les répercussions de la crise du coronavirus sur notre politique énergétique. Bilan !
L’audition de Julien Blanchet, rapporteur général de la Convention citoyenne pour le climat, s’inscrit dans le cadre des travaux de suivi, conduits par Daniel Gremillet, Roland Courteau et Daniel Dubois, de l’impact de cette crise sur le secteur de l’énergie. Après avoir entendu une cinquantaine d’acteurs de terrain depuis le début du mois d’avril (grands énergéticiens, fédérations professionnelles de l’électricité, du gaz et du pétrole, représentants de la rénovation énergétique, des énergies renouvelables – EnR – et des biocarburants, Commission de régulation de l’énergie, Médiateur de l’Énergie, Agence internationale de l’énergie) et relayé leurs difficultés auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire, les sénateurs ont jugé indispensable d’engager une réflexion prospective sur le devenir de notre transition énergétique.
« Tout reste à faire »
Aussi ont-ils échangé hier sur le rôle de la transition énergétique dans la stratégie de sortie de crise : pour les sénateurs, l’accompagnement de la rénovation énergétique, le soutien aux projets d’EnR, la lutte contre la précarité énergétique sont autant de leviers mobilisables pour relancer l’activité économique tout en atteignant nos objectifs énergétiques et climatiques. Les sénateurs ont rappelé leur vive inquiétude quant au cap poursuivi dans ces domaines par le Gouvernement, regrettant la difficile application de la loi « Énergie-Climat », pourtant adoptée dans un esprit de consensus par le Sénat en septembre dernier. Pour Daniel Gremillet, « six mois après l’adoption de cette loi, dont j’étais le rapporteur pour notre commission, tout reste à faire : une ordonnance a été adoptée, une dizaine de mesures règlementaires prises, un rapport publié. La programmation pluriannuelle de l’énergie et la stratégie nationale bas‑carbone viennent tout juste d’entrer en vigueur. Il faudra attendre l’été pour que le Gouvernement prenne l’ordonnance sur les centrales à charbon … davantage encore pour celle sur l’hydrogène. C’est trop peu et trop lent ».
« Accompagner les ménages en situation de précarité énergétique »
Les sénateurs ont regretté la faiblesse des moyens budgétaires et fiscaux mis par le Gouvernement en regard de nos objectifs énergétiques et climatiques, plaidant pour leur revalorisation significative à l’occasion des prochains textes financiers. Pour Roland Courteau, « il devient urgent de se pencher sur les difficultés rencontrées par nos énergéticiens en termes de trésorerie et d’investissement, de soutenir le secteur de la rénovation énergétique, en corrigeant les effets de bord de la dernière réforme du crédit d’impôt pour la transition énergétique et en améliorant les aides aux particuliers et aux entreprises, d’accompagner les ménages en situation de précarité énergétique, en revalorisant le chèque énergie. Lors du dernier collectif budgétaire, le Sénat a adopté, à notre initiative, plusieurs amendements pour soutenir les filières très sinistrées des biocarburants : il est regrettable que le Gouvernement ne les ait pas conservés in fine ».
« Une relocalisation des EnR est également nécessaire »
Enfin, les sénateurs ont relevé que la transition énergétique ne peut réussir sans indépendance énergétique, insistant sur la nécessité de garantir notre sécurité d’approvisionnement mais aussi notre souveraineté industrielle, dans un secteur aussi stratégique que celui de l’énergie. Pour Daniel Dubois, « l’atteinte de la neutralité carbone d’ici à 2050 nécessite un soutien réaffirmé à la filière nucléaire, qui continuera de produire la moitié de notre mix en 2035, et doit donc demeurer compétitive et attractive. À cet égard, la chute des prix de l’électricité, les difficultés de la régulation et les reports d’investissements observés dans cette filière ne constituent pas une bonne nouvelle pour le climat. Une relocalisation des EnR est également nécessaire : nous attendons beaucoup de l’application du critère du bilan carbone dans les futurs appels d’offres – apport sénatorial majeur à la loi “Énergie-Climat” – qui permettra à nos industriels français et européens de lutter contre le dumping environnemental ». Les sénateurs poursuivront leurs travaux de suivi tout au long de la crise et formuleront des préconisations concrètes pour inscrire la transition énergétique au cœur du plan de relance.