Pierre-Yves Thoulon, fondateur de la start-up Crosslux en est presque tombée de sa chaise. Mardi 13 octobre 2015, il apprend par téléphone de notre bouche du rédacteur que le sort de l’entreprise Nexcis, filiale d’EDF, serait scellé. La nouvelle est tombée en début d’après-midi, via un communiqué envoyé à la presse.
On se demande si EDF a envie quelqu’un récupère sa technologie CIS
100% des salariés ont adhéré au plan de départ volontaire ou accepté une proposition de reclassement interne au sein des groupes actionnaires. En local, seule la société Nawa Technologies spécialisée dans le stockage reprend sept salariés. Pour le reste, le Comité de surveillance de Nexcis n’a pas été en mesure de valider d’autres projets car ceux qui lui ont été transmis n’ont pas rempli à ce jour les critères déterminants garants de leur robustesse. « J’ai été ravi d’apprendre cette décision par voie de presse, ironise Pierre-Yves Thoulon sous le coup de l’émotion. C’est un comportement cavalier. Cela me semble conforme aux méthodes employées par le groupe EDF et résume assez bien le fonds de ma pensée : on se demande si EDF a envie que quelqu’un récupère sa technologie CIS. Nexcis se disait prêt à mettre l’outil à disposition mais dans la pratique ; il ne facilitait pas les choses en imposant des délais drastiques. Nous avons joué le jeu mais nous avons un peu l’impression d’être la mouche du coche dans cette affaire. Ils se sont servis de nous. Nous sommes très déçus. Mais nous allons continuer à nous battre. Sans nous résigner ».
Le soutien de toutes les institutions
Début novembre, les responsables de la start-up Crosslux envoyaient encore des pièces pour enrichir le dossier sécurisé de la reprise de Nexcis. Onze salariés sont concernés par la reprise. La liste a été soumise au comité de surveillance avec les projets d’embauche. Les actionnaires qui ont toute légitimité dans cette aventure industrielle ont donné des garanties. Mais les discussions se poursuivent. Depuis le 2 mars 2015 et l’annonce de la cessation d’activité, les fondateurs de Crosslux ont travaillé d’arrache-pied et ont beaucoup écouté. « Notre projet qui a souvent été modifié avait pour vocation de transformer l’entreprise et de faire fructifier et recapitaliser sur toutes ces années de R&D qui ont tout de même coûté la bagatelle de 75 millions d’euros dont un tiers d’aides publiques. Notre projet répondait pourtant aux trois critères fixés par le comité de surveillance à savoir que le projet soit financé, qu’il offre des perspectives industrielles et commerciales crédibles à moyen terme et qu’il propose des opportunités sérieuses de reclassement externe aux salariés de Nexcis. Nous avions le soutien de toutes les institutions locales avec la communauté d’Aix et régionales avec la Région mais aussi l’Etat avec la Direccte » stipule, amer, Pierre-Yves Thoulon.
Nexcis très vague sur les éléments manquants
Alors que toutes les pièces sont aujourd’hui rassemblées que manque-t-il au projet de reprise ? Le comité de surveillance de Nexcis demeure très vague sur le sujet des éléments manquants, la question du financement étant au centre de la décision. « C’est un fait, le financement est long à rassembler. Nous avons trouvé des actionnaires pour un tour de table de 2,5 millions d’euros. Certes, ils n’ont pas encore faits les chèques par le truchement des conditions suspensives mais ils les feront lorsque nous aurons récupéré les actifs. C’est le jeu de donnant-donnant classique avec des problèmes de timing et de date butoir. Mais le comité de surveillance de Nexcis ne semble pas jouer le jeu » indique fataliste Pierre-Yves Thoulon. D’ici à la fin de l’année, Crosslux peut compter sur 5 millions d’euros pour mener à bien son aventure industrielle. Pendant ce temps, le comité de surveillance de Nexcis, tout en évoquant des discussions qui avancent avec Crosslux indique qu’il va bientôt commencer la sélection des entreprises pour le démantèlement de l’usine. Ou comment souffler le chaud ou le froid ? « Qu’EDF arrête cette branche, on peut le comprendre. Mais qu’elle casse son jouet, cette belle technologie, sans laisser personne capitaliser dessus, c’est une situation ubuesque » poursuit Pierre-Yves Thoulon qui n’a pas encore dit son dernier mot.