Le collectif « touche pas à mon panneau solaire » avait appelé, ce vendredi, à une manifestation, qui selon les organisateurs a rassemblé un millier de participants. Partie de Bercy en milieu de journée elle a rejoint le lieu de la dernière séance de concertation boulevard Vincent Auriol. Il faut remonter aux débuts des années 80 pour trouver trace d’une manifestation de soutien à l’énergie solaire, à l’époque c’était le chauffe-eau solaire qui avait été sacrifié sur l’autel de l’électricité nucléaire. Les participants à cette manifestation étaient des salariés du solaire, dont une délégation de Photowatt, mais aussi des chefs d’entreprises et des représentants d’associations.
Tandis que la manifestation se poursuivait à l’extérieur du bâtiment, faisant entendre ses clameurs jusque dans l’intérieur de la salle, la cinquantaine de participants à la concertation réagissaient à la diffusion mercredi du pré-rapport Charpin-Trink. Le long tour de table à permis à toutes les organisations de renouveler leurs propositions trop peu reprises, à leurs sens, dans le rapport. Si une quasi-unanimité s’est faite sur la qualité du document, beaucoup on regretté qu’il apparaisse comme un « compte rendu de réunion » sans véritable prise de position, sauf quand il s’agit de soutenir les propositions de l’administration. Beaucoup de participants ont regretté une inégalité de traitement entre les chiffres avancés par les services de l’Etat, qui apparaissent en bonne place dans le document, et les contre-propositions qui seront reléguées en annexes.
On distinguera les éléments nouveaux suivants :
Pour les ONG, Maryse Arditi et Marc Jedliska on demandé que l’on vote sur les six propositions qui avaient déjà obtenu un large consensus. Par exemple le fait de raisonner en dépense CSPE et non en MW recueille un accord unanime. Cette demande reformulée par d’autres intervenants ne sera finalement pas retenue par le président Charpin.
André Antolini, fait remarquer « qu’il y a un grand absent dans le rapport, c’est le tarif d’achat». « Si la baisse du tarif était supérieure à 10%, cela serait inacceptable »
Pour Arnaud Mine, la parité réseau arrivera bien avant 2020, et il faut se préparer dès maintenant à construire une filière exportatrice, car le marché deviendra mondial et massif.
Le représentant de Veolia considère que c’est une erreur de ne pas raisonner en termes de rentabilité des projets pour fixer les tarifs d’achat : « Nous sommes le seul pays à ne pas le faire » (Ce point de vue est partagé entre autres par Marc Jedliska). Enfin pourquoi exclure d’augmenter la CSPE ?
Ariane Venin, mets en cause EDF EN, et maintien « posséder des preuves » sur le mélange des genres entre EDF et ses filiales.
Paris Mouratoglou ne comprend pas ces attaques. Son entreprise est la seule qui a soutenu Photowatt en commandant à celle-ci 30 MW sur 3 ans à des prix supérieurs à ceux du marché. Par ailleurs EDF EN est actionnaire et fait vivre 10 entreprises, qui font de la R&D, alors que le groupe ne possède que 25% de part de marché sur le PV, bien moins que dans de nombreux pays ou il « est très bien accueilli »
Pour Daniel Bour, le rapport Charpin-Trink, envisage plusieurs scénarii, mais à la fin c’est toujours celui de la DGEC (ministères) qui est finalement retenu. Le PDG de SUNCO, qui a créé 500 emplois en trois ans, fait remarquer que le marché des particuliers est déjà en recul de 50 %. Pour les grandes toitures le rapport entretien le flou absolu et pour les centrales au sol, les propositions du rapport excluent de fait les PME. Daniel Bour pense que le solaire « fera partie du bilan » et qu’il faudra le moment venu rendre des comptes devant les Français.
Hadrien Clement aurait aimé avoir une réponse à sa question posé lors de la dernière réunion sur la centrale de Beaucaire d’une puissance de 260 MW alors que la limite est normalement fixée à 12 MW. Il est, selon lui, facile d’établir un ratio économique pour évaluer la rentabilité d’un projet. Les appels d’offre prévus par le rapport seront réservés aux grands groupes.
Yann Maus renouvelle son souhait d’un volume minimal de 800 MW/an et plaide une fois de plus pour la mise en Å“uvre de mesures protectionnistes comme le font de très nombreux pays dans le monde. Les fermes au sol doivent être limitées à 12 MW
Pour Eric Vincent, au nom de GDF Suez, il faut éviter que les projets mis en instance par le moratoire ne boquent le système, « il faut donner une chance aux projets nouveaux ». Par ailleurs Eric Vincent propose que les PTF soient tacitement acceptées si ERDF ne répond pas dans les délais.
Richard Loyen d’Enerplan, regrette que la troisième voie, celle qui prévoit de porter le marché à 800 MW par an ne soit pas détaillée dans le rapport.
Jean-Pierre Fleury de la FNSEA, considère que le problème de la CSPE n’est pas traité sur le fond. « Le photovoltaïque va investir la sphère politique, c’est d’un choix de société qu’il s’agit ». La répartition des volumes qui donne une priorité au centrales au sol (200 MW/an contre 150 MW/an pour le résidentiel et 150MW/an pour les grandes toitures) n’est pas acceptable. « Il faut conserver les terrains pour les applications agricoles ». Sur la parité réseau, le rapport « prend le problème à l’envers ». La sortie du moratoire sera très délicate.
Pour Thierry Miremont de Photowatt, si le moratoire n’est pas la cause du plan social que subissent les salariés, il y a contribué. En effet l’entreprise a perdu 40 % de son plan de charge cette année. Un volume de marché de 800 MW/an est indispensable à l’entreprise. Thierry Miremont pronostique des difficultés à venir chez les encapsuleurs.
Thierry Lepercq considère que ce rapport montre que l’Etat ne croit pas en l’avenir du photovoltaïque. C’est peut-être une très bonne nouvelle. Ce sont aux entreprises de se prendre en charge et de relever le défi
André Joffre rappelle les difficultés pour financer les projets pourtant détenteurs d’une PTF, en effet les banques souhaitent avoir des garanties sur la date d’achèvement des travaux. Ce point est relayé par André Antolini qui demande « que se passe-t-il lorsqu’on dépasse d’un jour le délai imparti pour réaliser les travaux ? »
Deux députés de la commission des affaires économiques assistaient aux travaux, il s’agit de Mme Geneviève Fioraso, députée socialiste de l’Isère et Serge Poignant, président de la commission et député UMP de Loire-Atlantique.
Mme Fioraso a été particulièrement sévère sur le projet de rapport, tant sur la méthode employée que sur le contenu. Selon la députée de l’Isère lorsqu’on a mis autant d’argent dans la R&D il faut consolider avec l’industrie or « les modèles des PME-PMI, n’est pas la culture des grands corps de l’Etat ». Ce qui explique selon elle la mauvaise compréhension des petites entreprises. Le problème de l’augmentation de la CSPE est un sujet réel, en période de pouvoir d’achat érodé, « on peut envisager une taxe sur le nucléaire qui est amorti ». En conclusion, elle se prononce pour l’organisation d’un débat parlementaire.
Pour Serge Poignant, s’il y a des difficultés c’est parce que le gouvernement n’a pas mis en place assez tôt un groupe de travail pour anticiper les problèmes. « Il faut éliminer la spéculation, bien sûr, mais 500 MW/an c’est intenable ». « Le marché en 2011 et 2012 sera certainement de 1000 MW/an, on ne peut pas ensuite passer à 500 MW en 2013 ». Serge Poignant annonce que les deux rapporteurs MM Charpin et Trink seront auditionnés la semaine prochaine par la commission des affaires économiques.
En concluant les débats Jean-Michel Charpin, réfute une erreur de méthode. « Chaque rapport est différent ». Le rapport définitif sera bouclé la semaine prochaine et transmis aux ministres. Il est prévu que le projet de décret soit, lui, transmis par l’administration au cabinet du ministre « lundi ou mardi prochain». Les délais devraient donc être respectés pour que le décret puisse être publié avant le 9 mars.