Le conflit en Ukraine et la pandémie du Covid-19 ont souligné l’urgence d’un changement radical sur un large éventail de questions, avec comme conséquence d’accélérer le déploiement du ‘Green Deal’ ou pacte vert pour l’Europe, estime le directeur de l’Agence française de la cohésion des territoires (ANCT), Yves Le Breton. La guerre et la pandémie ont rappelé à quel point les questions telles que la sécurité de l’approvisionnement en énergie, en nourriture, en médicaments, qui semblaient jusqu’à présent abstraites pour de nombreux citoyens, sont concrètes, observe Yves Le Breton, dans un article du semestriel TerritoriALL (à paraître dans les prochains jours) édité par le programme d’études européen ESPON, spécialisé dans les analyses régionales.
« L’Europe prend désormais conscience qu’elle ne peut compter uniquement sur l’hinterland mondial pour assurer ses besoins essentiels », explique-t-il.
Ces questions, qui figurent au premier plan des priorités de la présidence française du Conseil de l’UE, ont toutes un impact sur la gestion des biens publics, dont la plus importante est l’utilisation des sols. Le ‘Green Deal’ européen a déjà proposé un modèle de développement plus économe en énergie, plus respectueux de la biodiversité, et basé sur une meilleure protection des sols et des terres. La Commission européenne a présenté en 2021 douze directives et règlements visant à  réduire les émissions carbones du continent d’au moins 55 % d’ici à 2030 et à atteindre la neutralité carbone en 2050.
Le défi, selon Yves Le Breton, réside dans la nécessité non seulement de « concevoir des territoires et des villes plus durables », mais aussi de « protéger les terres agricoles, de surveiller les risques d’approvisionnement énergétique et de relocaliser la production de biens essentiels et stratégiques ».« Anticiper et planifier écologiquement nos futurs besoins en rationalisant la gestion de notre espace intérieur et de nos ressources est stratégique pour nous assurer des conditions d’un développement plus autonome », insiste-t-il. Cela nécessite un aménagement stratégique du territoire qui ne soit plus guidé, comme dans l’après-guerre, par « des impératifs de croissance, mais aussi et surtout par la prise de conscience par les acteurs locaux qu’une gestion plus rationnelle de leur patrimoine territorial sera l’une des conditions fondamentales » d’un développement résilient et durable en période de transition et de crise. Un changement de paradigme qui impliquera également « davantage d’innovation ».
« Les réalisations de développements urbains plus justes et plus durables, moins énergivores sont encore des exceptions », mais devraient « rapidement se généraliser », estime le directeur de l’ANCT. Ces nouveaux modèles territoriaux nécessitent notamment des relations plus équilibrées entre les zones urbaines et rurales.  L’urgence sanitaire, qui a accru l’attrait de ces dernières, « pourrait constituer les prémices d’une ‘nouvelle donne’ ».