Le gouvernement allemand a annoncé ce jeudi une réduction de 20% à 30% de ses tarifs d’achat de l’électricité solaire, et ce dès le 9 mars : -30% pour les grandes centrales solaires jusqu’à 10 MW, avec un tarif ramené à seulement 13,5 centimes/kWh au lieu de 18 c environ, -25% pour les installations moyennes (jusqu’à 1 GW) à 16,5 centimes/kWh au lieu de 22 c environ, et -20% pour les petites installations, à 19,5 centimes au lieu de 24,43 c.
Quand aux centrales de plus de 10 MW, elles n’auront plus droit à aucun tarif d’achat préférentiel. C’est clairement la fin d’une manne allemande pour l’ensemble du secteur solaire mondial.
Non seulement la baisse sera deux fois plus forte que les -15% prévus par le programme de diminution des aides annoncé l’an dernier, mais elle sera avancée puisqu’elle aura lieu en mars et non en juillet.
Berlin a aussi annoncé que sa « trajectoire cible » d’installations solaires pour 2012 et 2013 restait de 2,5 à 3 GW par an mais qu’elle diminuera chaque année de 400 MW pour tomber à 900-1.900 MW en 2017.
A cette annonce, un peu partout, les cours des grands groupes solaires ont chuté ce jeudi d’environ 5 à 10% en Bourse, tout particulièrement le groupe allemand SolarWorld.
Autre nouveauté, les diminutions des tarifs d’achat seront ensuite étalées mensuellement pour éviter un rush en fin d’année. Enfin une partie de l’électricité des installations solaires (10 à 15%) ne pourra bénéficier des tarifs car elle sera censée servir à alimenter l’installation elle-même.
Freiner le marché
Cette décision radicale s’explique par le fait que la baisse de 15% des aides réalisée l’an dernier n’a pas empêché les installateurs allemands de poser 7,5 GW de panneaux en 2011, plus encore que l’année précédente et deux fois plus que planifié par Berlin.
En conséquences les aides au solaire, via le tarif d’achat qui est garanti pour 20 ans, ont atteint quelque 8 milliards d’euros l’an dernier, qui pèsent sur la facture d’électricité des consommateurs
L’Allemagne reste le premier marché solaire mondial, ayant représenté l’an dernier environ le tiers des nouvelles installations, d’un total d’environ 23 GW. Le pays a installé au total environ 255 GW de panneaux photovoltaïques.
Selon l’OCDE les Allemands paient trop cher leur énergie solaire : ils versent environ 0,25% de leur PIB pour que leur production d’électricité provienne à 20% de sources renouvelables alors que les Danois ne consacrent que 0,12% de leur PIB pour 30% d’électricité renouvelable.
Echapper au plafonnement
Cette décision est le fruit d’un compromis au sein du gouvernement allemand, et les entreprises solaires allemandes, qui comptent manifester cette semaine pour protester, ont échappé à un choix qui aurait été pour elles bien pire : en effet le ministre de l’Economie Philipp Rösler demandait de plafonner les installations solaires annuelles à 1 GW, estimant que les subventions devraient plutôt aller vers l’éolien, secteur plus susceptible selon lui d’aider l’Allemagne à abandonner le nucléaire en 2022.
Mais le ministre de l’Environnement Norbert Röttgen s’est opposé à un changement si radical qui selon lui serait catastrophique pour la filière et priverait l’Allemagne d’investissements solaires également nécessaires.
La crise du secteur solaire, avec des panneaux dont le prix a encore baissé de 46% en 2011 sous l’effet de la surproduction asiatique, a déjà poussé à la faillite plusieurs grands industriels allemands du secteur, comme Solon ou Solar Millennium. Et le pionnier Sunways, en grande difficultés, est en train d’être racheté par le chinois LDK, à bas prix.