Ronald Knoche, Président du directoire d’Eco Delta, développeur et exploitant indépendant de fermes solaires et éoliennes, réagit à la décision du Gouvernement de donner un nouveau cadre de régulation au photovoltaïque en écrivant une lettre ouverte au Premier ministre. Elle est publiée dans le quotidien Le Monde daté du 12 janvier. Ronald Knoche est une personnalité en vue du secteur. Eco Delta, qu’il a contribué à créer en 2002, figure parmi les premiers acteurs indépendants français, avec un portefeuille de 130 MWc, dont 35 MWc sont en construction ou en activité.
Afin de faire évoluer le cadre réglementaire de la filière de production d’électricité photovoltaïque et de favoriser les technologies les plus innovantes, le Gouvernement a décidé de mener une concertation qui devrait aboutir d’ici à mi-février. Jugeant que le nombre de projets de centrales déjà inscrits dans les files d’attente des deux gestionnaires de réseaux de distribution de l’électricité dépassait largement l’objectif fixé par le Grenelle de l’Environnement, il a publié un moratoire pendant la durée de la concertation. Le 9 décembre 2010, le décret n°2010-1510 a ainsi suspendu l’enregistrement de nouveaux projets et gelé de nombreux projets en cours.
Après une première réunion de concertation le 20 décembre, trois nouvelles rencontres sont programmées les 12, 17 et 24 janvier 2011. Avant ces réunions qui seront cruciales pour l’avenir des PME indépendantes de la filière, Ronald Knoche propose dans sa « Lettre ouverte à François Fillon, Premier ministre » cinq mesures pour faire sortir par le haut le photovoltaïque de la crise.
Monsieur le Premier ministre,
Le 2 décembre dernier, vous avez décidé de donner un nouveau cadre réglementaire à la filière photovoltaïque pour mettre fin à ce que vous appelez « la création d’une véritable bulle spéculative ». Vous jugez que l’essor de la filière, qui repose sur un tarif d’achat de l’électricité subventionné, est plus rapide que prévu et a un coût pour la collectivité et pour les consommateurs. Estimant que le nombre de projets déjà inscrits dans les files d’attente des deux gestionnaires des réseaux de distribution de l’électricité, l’ERDF et le RTE, dépassait largement l’objectif fixé par le Grenelle de l’Environnement, votre Gouvernement a publié le 9 décembre 2010 un décret suspendant les nouveaux enregistrements et gelant de nombreux projets en cours de réalisation. Cette mesure, présentée comme transitoire, devrait permettre d’aboutir à un nouveau cadre réglementaire après une concertation présidée par Jean-Michel Charpin et Claude Trink. Malgré le grave préjudice que nous cause ce moratoire, nous pensons, comme vous, qu’il est urgent de faire évoluer la réglementation. En effet, Eco Delta comme la centaine de PME françaises indépendantes et leurs milliers d’employés qui font la richesse et le dynamisme du photovoltaïque français, souffrent de l’instabilité du contexte réglementaire et financier. Nous estimons que cette instabilité a été accentuée par l’afflux récent d’avant-projets très peu avancés qui gonflent artificiellement les files d’attente. Pour l’essentiel, ils ont été présentés par les deux leaders du secteur, tous deux liés à l’Etat.
Le 12 janvier 2011 se tiendra une nouvelle réunion de concertation. Cette rencontre, et les suivantes qui auront lieu les 17 et 24 janvier 2011, seront cruciales pour l’avenir des producteurs indépendants, mais aussi pour l’émergence d’une filière de l’industrie photovoltaïque pérenne que Nicolas Sarkozy a appelée de ses voeux.
Avant ces réunions, nous souhaitons donc vous soumettre cinq mesures simples mais fortes, qui contribueront à maintenir la France dans le peloton de tête du photovoltaïque mondial.
1. Evaluer la puissance cumulée des projets en voie de réalisation par rapport aux objectifs du
Grenelle de l’Environnement, après suppression dans les files d’attente de tous ceux qui n’ont pas obtenu de permis de construire et n’ont pas renvoyé leur accord pour le raccordement avant le moratoire.
2. Préserver la confiance dans la parole de l’Etat en maintenant pour tous les projets autorisés et en cours de réalisation, les délais et les tarifs d’achat de l’électricité précédemment accordés.
3. Remplacer les deux files d’attente de l’ERDF et du RTE par une file d’attente unique sous le contrôle de la Commission de Régulation de l’Energie, autorité administrative indépendante qui gèrera les raccordements en toute transparence.
4. Favoriser, hors quotas proposés dans le rapport Charpin, le développement de nouvelles technologies à l’échelle industrielle labellisées par Oseo ou par les pôles de compétitivité.
Une filière industrielle, 100 % française, fabriquant l’ensemble des composants des modules photovoltaïques pourra ainsi se développer efficacement.
5. Stabiliser le cadre réglementaire des nouveaux projets en définissant les tarifs d’achat, appliqués lors de la mise en service, sur deux ans glissants afin de donner une visibilité financière aux opérateurs et continuer à laisser leur chance aux PME indépendantes. C’est ainsi que nous construirons ensemble l’avenir du photovoltaïque, tout en contribuant à la ré-industrialisation du pays dans le respect du pouvoir d’achat des Français.
Ronald Knoche,
Président du directoire d’Eco Delta
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