Paris, le 26 Avril Lors de l’émission « Complément d’Enquête », diffusée le 18 avril sur France 2, consacrée aux changements induits par la catastrophe nucléaire de Fukushima, le ministre de l’Environnement a justifié et assumé le coup de frein donné par le gouvernement à l’essor du marché français du photovoltaïque, par le fait que le cadre mis en place précédemment était « mal monté ». Principaux arguments avancés : un cadre libéral qui a favorisé les importations et une filière qui n’aurait pas atteint ses objectifs en matière environnementale.
Notre organisation professionnelle souhaite apporter un complément d’information, pour éclairer le débat national avec des faits et dénoncer des contre-vérités :
Oui, le développement du marché français a favorisé l’importation de modules photovoltaïques car l’industrie solaire est une industrie mondiale où l’Allemagne et l’Asie sont fortement positionnées.
Toutefois et dans le même temps, ce développement du marché national a permis l’émergence d’une filière française avec des capacités industrielles de production de modules photovoltaïques en France quasiment équivalente au marché annuel 2010. Avec près de 25 000 emplois créés en 3 ans, c’est tout un écosystème d’industriels et de services qui s’est développé dans les territoires, irrigué par la dynamique des pôles de compétitivité. Bref, la France commençait à combler son retard industriel et se positionnait même en pointe concernant l’intégration au bâti.
Notons que la charge du développement du marché PV, qui représente moins de 500 M€/an à financer sur les factures d’électricité pour le parc installé à fin 2010, représente trois fois moins que la subvention à l’électricité d’origine fossile que payent les français sur leurs factures*, alors que la charge de CSPE pour l’électricité solaire retombe à 75% dans l’économie nationale**.
Sur les objectifs environnementaux de la filière PV, nous voulons là aussi affirmer que les objectifs sont atteints autant que faire ce peut :
o Si la production de panneaux photovoltaïques consomme de l’énergie, le temps de retour énergétique d’un module solaire est évalué par la Plateforme Technologique Européenne du Photovoltaïque entre 0,5 et 3 ans selon les technologies, pour un ensoleillement sud européen***. Avec une durée de vie de 30 ans et plus, le photovoltaïque produit plus de 95 % d’énergie que nécessaire à sa fabrication. Les efforts continus de R&D au niveau des processus industriels tendent à réduire non seulement les coûts de production, mais aussi l’empreinte carbone des modules solaires.
o Concernant le recyclage, l’industrie européenne n’a pas attendu la France pour mettre en place une filière, déjà prête à recycler des produits. Ainsi, PV CYCLE, organisation initiée en 2007 par l’industrie européenne dorénavant mondiale, est d’ores et déjà opérationnelle pour la collecte et le recyclage des panneaux photovoltaïques, bien que son déploiement à grande échelle ne soit pas prévu avant 2025-2035, compte tenu de la progression du marché mondial de 0,3 GW en 2000 à 16 GW en 2010. Ainsi, grâce à PV CYCLE, l’industrie éprouve des solutions techniques et met en place des points de collecte et de reprise (aujourd’hui 110 dont 14 en France). Si l’industrie automobile a mis plus d’un siècle pour engager un processus de recyclage, et si la filière nucléaire est toujours à la recherche de solutions pérennes et économiquement viables, la filière photovoltaïque a pris ses responsabilités en amont pour apporter une solution du berceau à la tombe. Le « démantèlement » des modules solaires en fin de vie est prévu et assumé par le secteur.
Comparé aux filières fossiles et fissiles, le bilan environnemental du photovoltaïque est sans commune mesure excellent et l’industrie française pourrait en tirer un avantage compétitif si elle survit au nouveau cadre « plus restrictif » qui atrophie actuellement le marché. La filière française était pourvoyeuse d’emplois et d’innovations, elle est aujourd’hui très fortement malmenée. Pour Enerplan, de faux arguments ne peuvent être utilisés pour justifier des décisions politiques qui ont apporté une mauvaise réponse à une vraie problématique. Oui, il fallait faire évoluer la régulation, mais pas à contre-sens de l’histoire. Il n’est pas trop tard pour amender la régulation française, pour que la filière et les Français en sortent par le haut, sans attendre l’été 2012 en dilapidant des compétences et en fabriquant des milliers de chômeurs d’ici là .
* Calcul sur la base des informations de la CRE, avec une charge sur la CSPE pour la péréquation tarifaire et la cogénération prévue de 1,5 milliards € en 2010.
** Etude BIPE décembre 2010
*** http://www.eupvplatform.org
**** http://www.pvcycle.org