Les câbles à courant continu haute tension qui peuvent transporter efficacement l’électricité sur de longues distances jouent un rôle essentiel dans notre approvisionnement en électricité. Optimiser leurs performances est donc un enjeu important. Dans cette optique, des scientifiques de l’Université de technologie de Chalmers, en Suède, présentent un nouveau matériau isolant jusqu’à trois fois moins conducteur, offrant des améliorations significatives des propriétés et des performances de ces câbles.
Si nous voulons passer à un monde alimenté par les énergies renouvelables, un transport efficace de l’électricité sur de longues distances est essentiel, car l’approvisionnement – les sources d’énergie renouvelables telles que les parcs éoliens et solaires, ainsi que les barrages hydroélectriques – est souvent situé loin des villes, où existe la plus grande partie de la demande.
Pour passer à un approvisionnement énergétique plus respectueux de l’environnement
Les câbles à courant continu haute tension, ou câbles HVDC, sont le moyen le plus efficace de transporter l’électricité sur de longues distances. Les câbles HVDC avec une couche isolante peuvent être enterrés ou posés sur le fond marin, permettant une expansion considérable des réseaux, et de nombreux projets sont actuellement en cours pour connecter différentes parties du monde. En Europe, par exemple, le projet NordLink reliera le sud de la Norvège et l’Allemagne, et les projets de câbles HVDC constituent une partie importante de l’energiewende, le plan global de l’Allemagne pour passer à un approvisionnement énergétique plus respectueux de l’environnement. « Pour que nous puissions faire face à la demande mondiale croissante d’électricité, des câbles HVDC efficaces et sûrs sont un composant essentiel. L’approvisionnement en énergie renouvelable peut fluctuer, donc pouvoir transporter l’électricité sur des réseaux longue distance est une nécessité pour assurer une distribution stable et fiable », explique Christian Müller, responsable de la recherche et professeur au département de chimie et de génie chimique de Chalmers Université de Technologie. Pendant le transport, il faut perdre le moins d’énergie possible. Une façon de réduire les pertes de transmission comme celle-ci consiste à augmenter le niveau de tension continue. “Cependant, une augmentation de la tension de transmission affecte négativement l’isolation d’un câble HVDC”, explique Xiangdong Xu, spécialiste de recherche au département de génie électrique de l’Université de technologie de Chalmers « Les contraintes de champ électrique plus élevées qui en résultent pourraient être gérées si la conductivité électrique du matériau isolant était suffisamment réduite. » Les chercheurs présentent maintenant une nouvelle façon de réduire la conductivité d’un matériau isolant.
Un matériau qui confère aux câbles une conductivité trois fois inférieure
La base du nouveau matériau est le polyéthylène, qui est déjà utilisé pour l’isolation des câbles HVDC existants. Maintenant, en ajoutant de très petites quantités – 5 parties par million – du polymère conjugué connu sous le nom de poly(3-hexylthiophène), les chercheurs ont pu réduire la conductivité électrique jusqu’à trois fois. L’additif, également connu sous le nom de P3HT, est un matériau largement étudié, et compte tenu des quantités infimes nécessaires, ouvre de nouvelles possibilités pour les fabricants. D’autres substances possibles qui ont déjà été utilisées pour réduire la conductivité sont des nanoparticules de divers oxydes métalliques et d’autres polyoléfines, mais celles-ci nécessitent des quantités nettement plus élevées. « En science des matériaux, nous nous efforçons d’utiliser des additifs en aussi petites quantités que possible, afin d’augmenter le potentiel de leur utilisation dans l’industrie et pour un meilleur potentiel de recyclage. Le fait que seule une très petite quantité de cet additif soit nécessaire pour obtenir l’effet est un grand avantage », explique Christian Müller.
Une découverte qui pourrait déboucher sur un nouveau champ de recherche
Les polymères conjugués, tels que le P3HT, ont été utilisés dans le passé pour concevoir des composants électroniques flexibles et imprimés. Cependant, c’est la première fois qu’ils sont utilisés et testés comme additifs pour modifier les propriétés d’un plastique de base. Les chercheurs pensent donc que leur découverte pourrait déboucher sur de nombreuses nouvelles applications et directions de recherche. “Notre espoir est que cette étude puisse vraiment ouvrir un nouveau domaine de recherche, inspirant d’autres chercheurs à se pencher sur la conception et l’optimisation de plastiques dotés de propriétés électriques avancées pour les applications de transport et de stockage d’énergie”, déclare Christian Müller.