A l’ouest de Perpignan dans les Pyrénées-Orientales, le projet de parc photovoltaïque d’Ille sur Têt, initié depuis déjà plusieurs années et en phase de construction depuis mars 2014, sera achevé en juillet. Cette centrale solaire d’une puissance de 11 MWc, remarquablement intégrée au paysage et construite sur une ancienne décharge de pêches fait l’unanimité auprès des élus, des acteurs économiques locaux, des chasseurs et des écologistes. Voilà le genre de projets qui devrait faire tâche d’huile dans tout le Sud de la France ! Problème : A son niveau actuel, le tarif T5 ne permet plus de réaliser ce type de projets qui doivent désormais, pour sortir de terre, passer sous les fourches caudines de l’administration via les appels d’offres. Une sacrée entrave administrative au développement d’une énergie solaire pourtant très compétitive. A Ille sur Têt, le prix du kWh solaire est facturé 8,40 centimes d’euros, et donc sans douleur pour la CSPE. De quoi rendre Bruno Spinner, patron de Luxel, un brin fataliste !
Majestueux et recouvert de quelques ridules des dernières neiges de printemps, le Canigou surplombe le site d’implantation de la centrale solaire d’Ille-sur-Têt. A quelques kilomètres de là , des orgues minérales récitent le chant de la terre. Un lieu d’exception ! Cette centrale est répartie sur trois zones disjointes et occupe une surface de vingt hectares. Les installations sont visibles en bordure de route sur la zone sud, qui couvre l’emplacement de l’ancienne décharge communale, réhabilitée en 2002. Au Nord-Ouest, et au Nord, les secteurs sont très isolés et occupent par endroit d’anciens terrains dits de retraits de pêches. En effet, pendant de longues années, les arboriculteurs sont venus déverser à ces endroits des pêches et des nectarines qui ne trouvaient plus preneurs sur les marchés internationaux. Des décharges à ciel ouvert qui faisaient tâche dans le décor ! En fait 75% de la surface aujourd’hui occupée par la centrale étaient souillées par des déchets. Je suis heureux de voir ce projet aboutir. déclare Willy Burghoffer, maire d’Ille sur Têt. C’est une première réalisation d’envergure dans le cadre de la mise en Å“uvre de notre Agenda 21 local qui voit le site d’une ancienne décharge à ciel ouvert réhabilité par l’installation d’une production d’énergie propre. A Ille-sur-Têt, nous sommes passés des paroles aux actes. Avec, qui plus est, des retombées financières qui ne sont pas à négliger avec un apport de taxes sur la commune et l’intercommunalité se réjouit-il. Avec cette centrale solaire, la municipalité d’Ille sur Têt poursuit sa politique de développement durable et a engagé une action forte visant à valoriser le patrimoine communal tout en participant à l’effort national de production d’énergie renouvelable. Profondément attachée aux principes du développement durable dont elle a fait la priorité transversale de son action, la Municipalité souhaite, par ce projet, s’engager toujours plus en faveur de la protection de l’environnement et des économies d’énergie.
Une intégration exemplaire
A la base, ce projet a été développé par la société Emeraude Energie. Repris par Luxel, il a pris une nouvelle dimension passant de 6 à 11 MW avec dépôt d’un nouveau permis de construire à la clé. L’ensemble du nouveau projet a fait l’objet d’une étude d’impact sur l’environnement, réalisée par CRB Environnement, bureau d’études en environnement de Perpignan, ayant permis d’éviter toute zone présentant un enjeu environnemental. Ce bureau d’études réalise par ailleurs un suivi du chantier en phase de construction, et assure un suivi durant la phase d’exploitation de la centrale. « Il s’agit là d’un parc exemplaire nantis de nombreux îlots de verdure. La bande de cinquante mètres débroussaillée autour du parc fait office de coupe-feu et assure la sécurité incendie de tout le site. Nous retrouvons ainsi une mosaïque de milieux favorables aux oiseaux. Nous allons mettre en place des nichoirs mais aussi créer des mares et de nouvelles zones humides que nous avons déterminées à l’aide d’un drone un jour de fort écoulement des eaux afin de les positionner le plus pertinemment possible. De nombreuses espèces vont ainsi se réinstaller sur cet espace de 70 hectares et assurer la biodiversité » assure Thierry Roig, patron de CRB Environnement. Même les chasseurs qui ont bien sûr été consultés ne tarissent pas d’éloges sur cette réalisation. « Cette centrale est d’intérêt communal. Elle ne nous pénalise en rien pour pratiquer notre sport. Mieux même, elle a permis la création de chemin et de pistes périphériques pour faciliter l’accès des services du SDIS. Nous sommes ravis de la voir aboutir. C’est tout bénéfice pour notre association de chasseurs » souligne son président Joseph Rigole.
Emplois locaux et indépendance énergétique locale
Venons-en à la centrale elle-même. Elle est constituée de 43 500 modules photovoltaïques SolarWorld de technologie cristalline (4 MW en mono et 7 MW en poly), fabriqués en Europe. A ce titre, le tarif d’achat T5 fixé à l’époque du dépôt du projet à 8,40 centimes d’euros bénéficie de la bonification de 10% qui depuis l’intervention de la Commission Européenne n’a hélas plus cours. Sur ce chantier d’envergure qui durera quatre mois, près de cent cinquante ouvriers et ingénieurs se relaient chaque jour. « Si le contractant général est portugais, les sous-traitants sont des entreprises locales. Ainsi, les terrassements sont réalisés par une société audoise et la partie électricité par la Sotranasa dont le siège est à Perpignan » indique Bruno Spinner, PDG de Luxel. L’ancrage au sol des structures porteuses des modules se fait via des pieux. Ce choix technique limite l’apport de matériaux extérieurs, préserve la structure des sols et facilite la reprise de la végétation. Pour une meilleure intégration dans le site, les structures ne dépassent guère les 2,5 m de haut. Nos équipes d’ingénierie et de construction veillent à adapter les modalités de construction aux caractéristiques du site : Ensoleillement, terrain, pente, visibilité Ille sur Têt bénéficie de tout notre savoir-faire » constate Karim Moutawakkil, Directeur Technique de Luxel. La production annuelle de la centrale s’élèvera à 16 GWh d’électricité verte, pendant 20 ans minimum et contribuera à l’indépendance énergétique locale. Cela permettra en effet la couverture de 200% de la consommation en électricité de la Commune d’Ille sur Têt et 60% des 16 communes de la Communauté de Communes Roussillon Conflent. Avec la centrale solaire d’Ille sur Têt Luxel construit sa 25ème centrale au sol dont 6 livrées au cours des 12 derniers mois. Avec un portefeuille de 11 parcs solaires construits en propre en Languedoc Roussillon, et 31 sites en exploitation sur la région, Luxel confirme sa position d’acteur régional de référence. ajoute Bruno Spinner. Notre précédent projet languedocien a été inauguré en février 2014, à Thézan des Corbières, sur une ancienne décharge sauvage.
Une année 2015 catastrophe dans le solaire photovoltaïque avec de graves menaces sur l’emploi
Le prochain projet développé par Luxel se situe à proximité de Saint-Gély du Fesc dans l’Hérault. Il s’agit d’une centrale de 12 MW qui sera vraisemblablement la dernière à sortir de terre avec le tarif T5 qui se monte à 7,96 centimes d’euros majoré de 10% à 8,75 centimes d’euros le kWh. « Après, à 7,17 centimes d’euros le kWh soit le T5 actuel et sans la majoration, on ne sait plus faire » indique avec amertume Bruno Spinner qui dispose en réserve de près de 150 MW de projets. Pour Luxel désormais, le développement des centrales et la croissance de la société passeront par les appels d’offres. Luxel a déjà été lauréat d’un projet sur le CRE1, une centrale de 4,5 MW en Aquitaine. Mais autant dire que les appels d’offres ne sont pas la tasse de thé du groupe. Question visibilité ! « Voyez le CRE3 qu’on attend depuis des mois avant l’été, puis pendant l’été puis à l’automne. C’est du pur délire. Qu’est-ce que vous dites à vos salariés dans ces cas là ? Et puis ce délai d’un an juridiquement anormal accordé au lauréat du CRE1. Je suis outré. Cela montre la considération des pouvoirs publics pour notre activité » s’insurge le chef d’entreprise. Sur le CRE2, Luxel a déposé trois dossiers et elle n’a rien gagné. Il s’agissait de dossiers sans inconnu, très bien ficelés, avec permis de construire obtenu et étude effectuée sur la quote-part du S3REnR (Schéma de Raccordement des EnR). Cette quote-part peut varier dans des proportions susceptibles de condamner à mort n’importe quel projet. « Nous ne sommes pas des cow-boys. Quand nous présentons des dossiers, nous présentons des dossiers complets et finalisés. Pour le CRE2 et les appels d’offres simplifiés, l’absence d’obligation de construire est responsable de volumes énormes avec des projets perfectibles qui ne se feront pas. Si l’on ajoute à cela les reliquats de CRE1, le résidentiel en berne avec des tarifs à la baisse, un T4 et un T5 trop bas, l’année 2015 sera une catastrophe dans la solaire photovoltaïque. Il ya une grosse menace sur les emplois à l’heure où Ségolène Royal en a fait la priorité des priorités » prédit Bruno Spinner qui est l’un des membres du G12 du solaire. Ces professionnels réclament un calendrier et des volumes. Le gouvernement doit dès à présent définir les parts de marché. La filière saura mettre en face la ressource pour y parvenir. Pour l’heure, Luxel regarde un peu vers l’étranger, la Maroc où la société vient de réaliser l’ingénierie sur un projet de 2 MW. Alors que la centrale photovoltaïque exemplaire et consensuelle d’Ille-sur-Têt sera mise en service cet été à un tarif ultra compétitif qui ne grève en rien la CSPE, Luxel vit dans l’espérance de poursuivre son métier et de valoriser encore son savoir-faire unique de développeur de projets. Et d’invoquer l’astre solaire pour enfin, être prophète en son pays !
Encadré
Les chiffres financiers du projet
Un projet d’une valeur de 13 millions d’Euros
Des revenus fonciers à hauteur de 44 k€ chaque année pour la commune d’Ille sur Têt
Une fiscalité de 88 k€ annuelle pour la communauté de commune, le département et la région.
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