L’autoconsommation collective (ACC) bénéficie à présent du même régime d’accise que l’autoconsommation individuelle (ACI) pour les sites de moins de 1 MW. C’est la conséquence de l’article 21 du Projet de loi de finances pour 2025, définitivement adopté le 6 février dernier suite au 49.3 du gouvernement. Il s’agit d’une avancée majeure pour l’autoconsommation collective. La demande était portée de longue date par nombre d’acteurs (Enerplan, La Plateforme Verte…)
La nouvelle intervient alors que plusieurs rescrits fiscaux attendaient une réponse pour clarifier qu’au moins les ACC patrimoniales puissent bénéficier d’une dispense d’accise, par exemple pour les bâtiments d’une collectivité. Elle intervient également simultanément avec d’autres évolutions importantes concernant le prix d’électricité. En effet, au 1er février 2025, le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité (TURPE) a connu une hausse de 7,7% tandis que le tarif régulé a diminué de 15% passant de 25,16 c€/kWh à 20,16 c€/kWh. La Commission de Régulation de l’Energie (CRE) réfléchit par ailleurs à réviser le mécanisme des heures pleines / heures creuses avec pour effet de bord de rendre le solaire économiquement moins avantageux en journée l’été.
Disparition de l’accise : un relai de compétitivité pour l’ACC
Or, la rentabilité de l’autoconsommation collective vient du prix que le producteur peut attendre de la vente des électrons à ses voisins, prix qui dépend de ce que les voisins sont eux-mêmes prêts à consentir en comparaison de leur prix d’électricité classique. « Plus la proportion de TURPE est importante, plus le tarif régulé est bas, et moins le producteur peut vendre son kWh à un prix valant l’investissement, qui lui est un peu plus élevé en autoconsommation collective du fait du coût spécifique que constitue le recrutement des consommateurs. La disparition de l’accise offre donc un relai de compétitivité à ce modèle d’affaires » précise Alexandra Batlle, secrétaire générale du bureau d’études Tecsol spécialisé dans l’ACC. En effet, l’accise représente 3,37 c€/kWh, soit à elle seule plus de 15% du prix d’un kWh au tarif régulé. Si on ajoute la TVA calculée dessus (en France on paie des taxes sur les taxes), la mesure du budget 2025 équivaut à une baisse d’environ 25 % du prix global de l’électron pour les consommateurs concernés. « C’est aussi une économie de deniers publics : plus les électrons sont vendus en circuit-court moins le surplus à acheter par l’Etat est important, et moins le réseau est sollicité au-delà des lignes les plus proches sur la basse ou moyenne tension » poursuit Alexandra Batlle. Sans parler du coût de la collecte des taxes, qui pouvait être onéreux pour le gain à en attendre par l’administration (l’autoconsommation collective demeure un phénomène limité à environ 700 opérations et 6 000 participants, même si on a vu un doublement en un an).
Un appel aux banques
Cette ouverture est décidément bienvenue, à l’heure où la CRE annonce le report de la publication des tarifs d’obligation d’achat trimestriels du « S21 ». Elle apporte qui plus est une alternative à l’appel d’offres Autoconsommation. Le complément de rémunération de cet appel d’offres est calculé pour permettre une compensation de l’accise et du TURPE mais c’est un concours, qui par définition fait des gagnants et des perdants, et auquel ne peuvent se présenter que les installations de plus de 500 kW sur un même site. Comptons sur les banques pour travailler avec les professionnels des ENR à la garantie des projets d’autoconsommation collective, par la valorisation des surplus dans des systèmes de stockage.
« Le législateur serait bien inspiré de supprimer l’obligation de licence »
Attention cependant à ne pas parler d’exonération. L’autoconsommation collective est éligible au taux réduit d’accise à 0 € / MWh pour au moins un an. À tout moment, le ministère peut décider par décret de fixer un montant positif (c’est déjà un risque pour l’ACI, qu’on retrouvera donc également en ACC). « Dans cette continuité, le législateur serait bien inspiré de supprimer l’obligation de licence qui engendre un frein disproportionné à l’autoconsommation collective, les producteurs étant en peine de l’assumer, que ce soit par eux-mêmes (tout le monde n’est pas EDF) ou par les agrégateurs, délégataires potentiels visés par la loi mais qui ne trouvent pas d’intérêt économique à le faire » confie la secrétaire générale de Tecsol. Mais chaque chose en son temps. Pour l’heure, entendons le signal encourageant de la suspension de l’accise pour les acteurs qui contribuent à la construction d’écosystèmes énergétiques de proximité.
Encadrés
Les termes de la loi
L’article L312-87 du code des impositions sur les biens et services (CIBS) est ainsi rédigé désormais :
“Relève d’un tarif particulier de l’accise l’électricité qui répond aux conditions cumulatives suivantes : 1° Elle est produite à partir d’énergie éolienne, solaire thermique ou photovoltaïque, géothermique, marine, hydroélectrique, d’énergie ambiante, de la biomasse, des gaz de décharge, des gaz des stations d’épuration d’eaux usées ou de gaz produit à partir de la biomasse ; 2° La puissance installée sur le site de production est inférieure à un mégawatt. Pour l’énergie solaire photovoltaïque, cette puissance s’entend de la puissance crête ; 3° Elle est consommée pour les besoins des activités de la personne qui l’a produite ou des consommateurs participant à une opération d’autoconsommation collective au sens de l’article L.315-2 du code de l’énergie.” |
Synthèse simplifiée sans compter les autres taxes que l’accise
Prix maximum du kWh en ACC avant (en c€) :
20 (tarif régulé) – 5 (taxes) – 7 (TURPE) = 8 c€
Prix maximum du kWh en ACC à partir de mars 2025 (en c€) :
20 (tarif régulé) – 7 (TURPE) = 13 c€
è Vendre en ACC est plus avantageux pour le producteur que vendre au tarif d’obligation d’achat (actuellement autour des 10 c€/kWh)