Au cÅ“ur de l’été le verdict est tombé pour ce qui est des appels d’offres. Cette désignation a comme toujours, en pareille circonstance, fait quelques heureux, la Compagnie du Vent avec GDF Suez et Urba Solar notamment, et aussi pas mal de déçus. Un constat : La recherche de la plus grande productivité des centrales à conduit les développeurs à les localiser dans les zones les plus ensoleillées. Témoignages de trois acteurs primés en 100-250 kWc et au-delÃ
Un peu de géographie pour commencer. Le tropisme du Sud a véritablement aimanté les projets soumis à appels d’offres. Ainsi, pour les projets de plus de 250 kWc, la région PACA attire 25% des projets retenus, le Languedoc-Roussillon près de 20 % à égalité avec l’Aquitaine et Midi-Pyrénées et la Corse autour de 6% chacune. Les autres régions ne font que de la figuration et certaines d’entre-elle ne possèdent même pas de projet. Pour les installations dont la puissance est comprise entre 100 et 250 kW, le phénomène est encore plus marqué et les 109 projets (21 MW) se concentrent en régions PACA (48%), Languedoc-Roussillon (21%), Midi-Pyrénées (8%), Poitou-Charentes (6%) et Rhône-Alpes (5%). Ainsi ces cinq premières régions représentent 88% de la puissance autorisée. Vous avez dit déséquilibre ?
Appels d’offres = Compression des marges
Pour les appels d’offres de grande puissance, la société Fonroche Energie a remarquablement tiré son épingle du jeu. Elle fait partie des grands gagnants. « Je ne vous cache pas que l’on a sabré le champagne avec 35 MW de projets en propre dont 23 MW de serres. Au total, nous avons même 63 MW de modules concernés par les appels d’offres. Nous sommes rassurés. Cela nous procure deux ans de visibilité. Ils sont rares les fabricants français qui ont aujourd’hui de la visibilité. Je suis d’ailleurs étonné de voir que peu de fabricants français ont été choisis. Cela dit ne nous y trompons pas. Le choix de la CRE sur les filières traditionnelles a été dicté par le prix. Nous avons donc sacrifié nos marges. Aujourd’hui, c’est un fait, Fonroche gagne plus d’argent à l’étranger qu’en France » tempère Yann Maus, le PDG de Fonroche Energie. Il faut dire que cette dernière avait mis toutes les chances de son côté avec certification ISO à la clé et programmes de R&D labellisé par l’Ademe. Fonroche Energie est également porté par la dynamique des serres solaires désormais plébiscitées par les chambres d’agricultures car elles apportent une vraie valeur ajoutée agricole aux paysans. Les retours de culture sont très positifs. « 23 MW de serre, c’est cent cinquante emplois créés » se réjouit Yann Maus. Reste l’épineux problème des préaccords de financement et des lettres d’intention. « Il est compliqué pour tout le monde de lever de l’argent. Ce n’est jamais facile, c’est le nerf de la guerre. Nous faisons tourner nos actifs » renchérit Yann Maus.
La stratégie des appels d’offre manque de maturité
La société Luxel, spécialiste du développement de petits parcs au sol a quant à elle sauvé les meubles avec un seul projet retenu de 4,5 MW qui est situé à quelques encablures de la centrale nucléaire de Blaye. Comme un symbole ! Luxwel est la plus petite société indépendante à avoir glané un appel d’offre. « Cela met un peu de beurre dans les épinards mais cela est loin d’être suffisant. Ce projet permet de survivre un peu mais pas de tenir deux ans et demi avant les prochains appels d’offre » s’emporte Bruno Spinner, président de Luxel. C’est justement dans ce contexte de tensions que le président François Hollande et le premier ministre ont annoncé lors de la conférence environnementale des 14 et 15 septembre le lancement de nouveaux appels d’offre anticipés dès la fin de l’année 2012. Histoire de redonner un élan à la filière ! « On aurait préféré d’autres annonces. Pour tout dire, la stratégie des appels d’offre c’est un peu du n’importe quoi. Elle manque de maturité. Pour passer, certains opérateurs font appel à des technologies exotiques. Sur le plan administratif, les appels d’offre sont très lourds. Ils nous coincent aussi avec ce que l’on propose qui plus est dans un temps imparti et des délais contraints » juge sévèrement Bruno Spinner. On l’aura compris, la solution semble ailleurs.
Des règles perfectibles
Même son de cloche pour Daniel Bour président de la Générale du Solaire dont aucun projet n’a été sélectionné en plus de 250 kWc, du moins en direct. « Nous avons voulu jouer la carte française à 100% donc plus chère. On l’a payée. C’est frustrant car cela représente beaucoup de travail. Les règles sont trop complexes et dénuées de transparence. Il est urgent de les simplifier pour éviter toutes suspicions » insiste Daniel Bour. Qui a, en revanche, été servi pour les appels de la catégorie 100-250 kWc à hauteur d’une dizaine de MW sur des toitures déjà existantes ou sur des bâtiments à construire. « Les travaux sont d’ailleurs parfois plus simples sur du neuf que sur de l’existant avec la pression des activités en dessous et les études de charpente confirme le chef d’entreprise. Au-delà des griefs liés aux appels d’offres, Daniel Bour soulève trois autres points noirs qui empêchent la filière de s’exprimer pleinement. « Il nous faut travailler ensemble sur les coûts des raccordements qui ont littéralement explosé. Nous avons l’impression de payer pour les autres. Il faut remettre sur le tapis la notion d’intégration qui pèse à hauteur de 15% sur l’investissement. Le sur imposé pourrait nous faire gagner 3 à 4 centimes rapidement. Reste enfin le problème du coefficient d’indexation du tarif qui demeure trop plat avec un indice trop bas. Il faudrait peut-être s’inspirer des règles italiennes avec des tarifs qui bougent avec le prix de l’électricité » estime Daniel Bour. Autant de règles perfectibles qui, ajoutées à l’immaturité des appels d’offres, font état d’un marché du photovoltaïque difficile à appréhender pour les entreprises du secteur.