Après plug, baby plug, c’est cut, baby cut !

Je déteste la vulgarité. Elle m’horripile, me fait dresser les poils. La vulgarité, elle peut être dans les mots, mais elle peut être aussi dans les postures, dans les comportements, dans la façon péremptoire d’affirmer une vérité un jour qui le lendemain s’étiole comme une fleur d’amandier après un potron-minet printanier gélif. Jules Nyssen, président du SER, a vécu ces derniers jours sous le signe d’un surréalisme éthéré et d’une insupportable brutalité. Ainsi évoque-t-il lundi et mardi dernier, au sommet de l’IA, le discours emphatique, en anglais, d’Emmanuel Macron qui veut faire de la France la championne de l’accueil des data centers en misant sur son offre d’électricité décarbonée autour d’un slogan à la Trump « plug, baby plug ». Pas la ref la plus inspirée…

 

« Le jour d’après, voilà qu’une conseillère de Marc Ferracci, ministre délégué à l’économie et l’énergie, nous annonce à Bercy lors d’une réunion de restitution de la consultation lancée sur le soutien à la filière PV une forte réduction de l’ambition à 2035 par rapport à au projet de PPE mis en concertation à savoir 65 GW soit 10 GW en-dessous de la fourchette basse annoncée au préalable et très en dessous des 100 GW annoncés par Bruno Le Maire il y a deux ans sous le doux soleil de Manosque » s’enrage Jules Nyssen. Et la purge de ne pas s’arrêter là. La spin doctor a surenchéri sur la réduction drastique des tarifs d’achat sur le solaire en toiture (ndlr : nouveau tarif à 95 € le MWh) qui va engendrer un moratoire de fait dès la fin du printemps sur le segment – 100 à 500 kW – le plus dynamique du secteur. « Ce n’est plus plug, baby plug mais plutôt cut, baby cut » ajoute Jules Nyssen sur un ton sarcastique, agacé par tant d’instabilité et de stop-and-go dirimants.

 

Cette manière de procéder rappelle les élucubrations vulgaires de Donald Trump, dans sa façon de gouverner, à grand coup de menton, juste pour faire le buz… Ce rétropédalage est aussi un signe de mépris pour toute une filière derrière laquelle il y a des emplois, des artisans, des agriculteurs…Ces derniers déjà maltraités par des accords de libre-échange ne méritaient pas cela. « Il faut savoir qu’environ 80% du segment 100-500 kWc concernent des projets agricoles. Chaque GW de solaire 100-500 kW rapporte 400 millions d’€ au monde agricole, entre soulte et loyers. Avec 2 GW en rythme annuel sur ce segment, c’est actuellement 800 millions d’euros par an qui revient aux agriculteurs. Le coup de rabot sur ce segment est un coup terrible porté au monde agricole et aux paysans  » insiste Jules Nyssen.

 

Pour le président du SER, il semble bien que la politique énergétique du pays soit davantage le fait de la direction du budget que de celle de la transition énergétique. « Dans sa procrastination, la direction du budget a décidé de serrer la vis à la filière en attaquant et en bridant son segment – 100-500 kWc – le plus dynamique. Nous avons conscience du sujet budgétaire. Nous avons d’ailleurs fait, lors de notre Université, des propositions comme des AO simplifiés ou du cautionnement sur les projets photovoltaïques pour optimiser l’impact du solaire. Mais cela ne sert à rien. Malgré les lignes consensuelles qui se dégagent depuis deux ans autour de la nécessaire et incontournable stratégie d’électrification des usages pour décarboner le pays, rien n’y fait. Et ce malgré une balance des paiements à +5 milliards d’euros et le poids financier des vieux contrats qui se terminent à partir de 2026. Le gouvernement fait comme si tout cela n’existait pas. Il est où le problème ? » s’exaspère Jules Nyssen qui en appelle aux parlementaires pour revenir à la raison sur ces sujets.

 

Pour l’heure, l’arrêté doit passer par les fourches caudines du CSE (Conseil Supérieur de l’Energie), tandis que le projet de PPE demeure sur la table. Alors qu’une question n’en finit pas de tarauder le patron du SER : « Comment, dans ce contexte, fournir d’ici à 2027 les 170 TWh de consommation électrique liée à tous les projets d’IA annoncés lors du sommet parisien ? Et si l’on arrêtait de marcher sur la tête ! ».

 

 

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