Vous vous souvenez peut-être des luddites. Ou pas ! Il s’agissait d’artisans du textile en Angleterre au début du XIXème siècle, qui ont mené des révoltes contre le progrès technique et l’automatisation en détruisant des machines et en s’opposant à la révolution industrielle. On les appelait les « briseurs de machine ». Inspiré de ce mouvement et de ces luttes historiques, le néo-luddisme, néologisme apparu en 1990, désigne aujourd’hui une mouvance activiste d’orientation technophobe qui s’oppose à la progression des nouvelles technologies, prônant une vie sans objets connectés, sans algorithme et sans IA.
Et la question de se poser. Le néo-luddisme serait-il à l’œuvre dans le nébuleux écosystème français de l’énergie cornaqué depuis des lustres par les tenants de l’atome ? Alors certes, le nucléaire est une technologie de pointe, mais une technologie datée de plusieurs décennies, où il n’est trop souvent question que d’anomalies de fabrication de l’acier de couvercles ou de fonds de cuves de réacteurs, de radiers béton fissurés, de besoins en soudures de haute précision pour lesquelles la France lance des appels à l’aide désespérés en direction des Etats-Unis ou de la Corée du Sud qui maîtrisent le sujet. On a connu mieux en matière de souveraineté…
Ce qui coince aujourd’hui avec les acteurs historiques français de l’énergie et leurs affidés, c’est que l’énergie devient de plus en plus digitale. Sa puissance ne s’exprime plus exclusivement par la force de production rigide de titans massifs de béton et d’acier des bords de fleuve – et dorénavant d’océans pour cause de réchauffement climatique -, qui envoient du courant nucléaire à des centaines de kilomètres mais bien au contraire par la flexibilité des outils numériques, par la souplesse des clouds, par la science des datas, par l’intelligence des algorithmes, par le potentiel des batteries lithium-ion ou encore par la force prédictive des IA… Des newtechs au service de l’énergie pour optimiser au mieux le moindre électrons verts produits en proximité, pour partager collectivement ces énergies propres en circuits-courts, pour agir le plus efficacement sur la maîtrise de l’énergie !
Ce changement total de paradigme qui entre dans le sens de l’histoire énergétique planétaire fait se dresser les nostalgiques du producteur unique tout puissant. Chez eux point de vandalisme ou de casse comme chez les luddites ! Les mouvements néo-luddites de l’énergie travaille en amont, dans les couloirs des ministères, les salles des pas perdus des assemblés, pour faire obstacle à cette nouvelle déclinaison numérique de l’énergie. Preuve accablante ! Pas un mot sur le stockage dans la nouvelle PPE, le stockage ce point central pour pallier la variabilité des renouvelables et maximiser la flexibilité auprès des consom’acteurs. Une omission regrettable !  Un néo-luddisme en col blanc !