Ancien d’EDF Renouvelables, David Augeix a créé il y a trois ans à Montpellier, avec deux compagnons de route, une société de développement solaire appelée Incidences. Par bonheur, il vient de finaliser le financement de la construction de sa première vague de projets. Avec soulagement ! Alors que le moratoire se profile, la deuxième phase de développement s’annonce beaucoup plus ardue. « Reste à croiser les doigts » !
Voilà plus de 25 ans que David Augeix s’épanouit dans les renouvelables. Par passion. Après une carrière bien remplie chez EDF Renouvelables, il s’est relancé dans une aventure entrepreneuriale avec deux amis. Toujours dans le solaire dont il a connu tous les soubresauts des deux dernières décennies. Alors autant dire que la nouvelle attaque du gouvernement sur la filière, n’est qu’un avatar de plus dans son cheminement. Ce qu’il ne veut pas dire que la situation ne l’inquiète pas, bien au contraire. « Nous avons déjà vécu tout ça. Tous les quatre matins, le ministère se plaît à nous changer les règles du jeu, entre AO, tarifs d’achat et moratoire qui ne dit pas son nom. On nous dit que le solaire est trop cher, qu’il n’est pas compétitif. Mais la société, les ménages ne s’y trompent pas et plébiscitent l’autoconsommation qui montre la compétitivité du solaire » analyse David Augeix, un brin dépité par l’approche gouvernementale de la gestion de l’énergie.
« Nous ne parvenons pas à structurer l’industrie et à pérenniser des acteurs solides et compétitifs »
Depuis l’an 2000, lors de la période du gouvernement Jospin et sous la férule du député Yves Cochet, la France a mis en France un tarif d’achat largement bonifié par de Villepin en 2006. « Depuis ce début de millénaire, nous vivons une succession de stop&go. Vous savez les politiques françaises ont un défaut, elles souffrent de court-termisme. Nous ne parvenons pas à structurer l’industrie et à pérenniser des acteurs solides et compétitifs. Même les grands groupes le diraient, eux qui comme Engie ou EDF souffrent aussi de cette morosité. Nous sommes contraints de faire avec les politiques que nous avons. Le fait de ne pas aborder l’avenir avec sérénité ne contribue en rien à la nécessaire électrification des usages » poursuit David Augeix. Parmi les signaux préoccupants, la réforme à venir du S21. « C’est simple à 95 euros le MWh pour des toitures et encore plus pour des ombrières, plus aucun banquier ne nous suivra. C’est du bon sens. La profession ne comprend pas. Entre 110 et 115 euros le MWh, le solaire est compétitif en toiture sur le 100-500 kW. Et ceci sans grever les comptes d’EDF. On sait que la CRE et Bercy adorent les AO. Qu’ils les mettent en place, nous répondrons tous au-dessus de 95 euros le MWh. Ils verront bien » s’agace le patron d’Incidences.
« Nous ne sommes pas dans les priorités de l’Etat »
Et que dire aussi du tarif S23, celui du petit sol, celui des centrales de 1 MW installées sur un hectare dans une dent creuse d’une zone économique ou sur un délaissé. Le solaire au sol intelligent avec zéro impact sur la biodiversité ! Des GW sont en attente. « L’avis du CSE est sorti en juillet, celui de la CRE en septembre. Et le texte n’est toujours pas sorti. La France a deux ans de retard sur la publication d’un simple papier. On mesure là le niveau d’engagement de l’Etat alors qu’il prétend soutenir la filière. Nous ne sommes dans ses priorités. Ce texte, d’ailleurs, sortira-t-il un jour ? » s’interroge David Augeix qui se demande également ce va faire la France en matière de production d’électricité jusqu’en 2035, alors que le nucléaire n’est pas attendu avant cette date, qui plus est, sans aucune certitude et sans aucune garantie de tarif compétitif. « Pour l’heure, chez Incidences, nous poursuivons notre deuxième phase de développement en espérant que nos gouvernants reviennent à la raison » conclut l’indécrottable optimiste David Augeix.