L’État pressé d’accélérer alors que le Conseil d’Etat examine le recours d’Énergies Renouvelables pour tous

Lundi 30 septembre dernier se tenait l’audience au Conseil d’Etat du recours porté par l’association Energies Renouvelables pour Tous et défendu par le cabinet Huglo-Lepage, dont l’objectif est de contraindre le gouvernement à respecter les objectifs européens de développement des énergies renouvelables. Le rapporteur du Conseil d’Etat préconise le rejet du recours de l’association, arguant que les objectifs sont sur le point d’être atteints et que l’Etat fait les efforts nécessaires. La décision finale doit être rendue dans quelques semaines, mais Énergies Renouvelables pour tous a déjà décidé de porter son recours devant la Commission européenne.

Le recours d’Energies Renouvelables pour Tous est examiné par le Conseil d’Etat simultanément à un autre recours, porté par Eolise, développeur français d’énergies renouvelables, sur le même motif. Les conclusions du rapporteur public vont dans le sens du rejet dans les deux cas.

 

Un recours pour obliger le gouvernement à respecter ses engagements

européens

 

Déposé à la suite d’un rejet implicite des requêtes formées auprès du Ministère de l’Ecologie au printemps 2023, le recours de l’association Energies Renouvelables pour tous porte sur le manquement de l’Etat au respect des obligations européennes pour atteindre 42,5% d’énergies renouvelables dans la consommation finale brute d’énergie en 2030. Alors que les objectifs fixés pour 2020 ont été manqués par la France (23% toujours pas atteints en 2023), l’association entrevoit un échec similaire pour les objectifs de 2030, le gouvernement ayant déjà annoncé cet été à la Commission Européenne un objectif de 35% (contre les 44% attendus par la Commission). En obligeant l’Etat à se conformer à ses obligations, l’association demande de facto une accélération des mesures de soutien aux énergies renouvelables, dont le déploiement reste trop lent pour faire face aux défis du changement climatique, mais aussi un effort particulier à l’électrification et à la sobriété, indispensables pour tenir la trajectoire. Pour rappel, le Haut-Commissariat au Changement Climatique vient d’annoncer que la France ne tiendra pas son second budget carbone.

 

Les conclusions du rapporteur public

 

Pour justifier sa demande de rejet, le rapporteur public fonde son argumentaire sur le fait que la consommation finale brute issue des énergies renouvelables devrait excéder, en 2024, l’objectif fixé par la PPE pour l’année 2020. Quant à l’objectif 2030, indiqué notamment dans le Code de l’Énergie (33% d’énergies renouvelables dans la consommation finale brute), le rapporteur indique qu’il n’est pas engageant et qu’il reste par principe atteignable puisque 2030 est une échéance éloignée. La défense, dans ses conclusions, fait l’inventaire des efforts réalisés par l’Etat pour tenir la trajectoire des 33% : loi APER, accroissement du budget du fond chaleur, soutien à la rénovation énergétique des logements, préparation de la nouvelle PPE… Hélas, la réalité est plus complexe et moins reluisante : le budget du fond chaleur est menacé, la loi de programmation est dans les limbes… La tendance est donc inquiétante et, malgré un volontarisme affiché, la trajectoire est chaque année plus divergente.

 

L’urgence de l’électrification

 

A cela s’ajoute le retard pris dans les efforts d’électrification. Pour réduire de façon drastique les émissions de gaz à effet de serre, l’électricité doit remplacer l’usage des énergies fossiles. En Chine, la part d’électricité dans l’énergie finale est aujourd’hui de 30%, contre 21% à l’échelle mondiale. Les ventes de voitures électriques (dont les véhicules hybrides rechargeables) y dépassent désormais les ventes de voitures thermiques. Il faut urgemment reprendre cette bataille et électrifier massivement les secteurs (l’industrie, la chaleur, le transport) dont la dépendance aux énergies fossiles demeure trop forte, tout en s’assurant que cette électricité provient de sources renouvelables, peu chères et rapidement disponibles (à la différence du nouveau nucléaire, déjà hors délai puisque la mise en service des EPR ne devrait pas intervenir avant 2037). Sans une accélération de cette transition, les objectifs climatiques ne seront pas atteints.

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