Le Gouvernement annonce ce jour qu’il renonce à présenter une loi de programmation de l’énergie et relance une consultation sur la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Ce n’est une bonne nouvelle ni pour le climat, ni pour l’autonomie stratégique de la France, ni pour notre sécurité énergétique.
Le point positif, c’est la référence à la « stratégie française énergie climat » (SFEC) qui avait été largement débattue tout à long de l’année 2023. Mais on se demande l’intérêt de la soumette à nouveau à un débat public, au risque de perdre encore un temps précieux.
Quoi qu’il en soit, prenons acte de la volonté du ministre de l’énergie de reprendre les conclusions des travaux menés l’année dernière, qui avaient permis d’identifier les objectifs de développement des énergies renouvelables nécessaires pour garantir la sécurité énergétique de la France, tout en accélérant la sortie des énergies fossiles : une multiplication par 5 de la production d’électricité solaire (soit 100 GW de capacités installées) d’ici 2050 ; un doublement de la capacité de production éolienne terrestre (soit 40 à 45 GW) ; une capacité de 45 GW d’éolien en mer. Le ministre n’a cependant pas précisé l’ambition qu’il porte s’agissant des filières de production de chaleur renouvelable, qui seront absolument essentielles pour boucler l’équation énergétique globale, notamment le bois-énergie, tandis que les objectifs affichés pour les gaz renouvelables semblent beaucoup trop faibles (multiplier la production de biogaz par 5 d’ici 2050). Ajoutons enfin qu’il manque dans ce texte les objectifs permettant de lancer les premiers appels d’offres sur l’hydrolien, comme le Président de la République s’y est engagé à Nantes le 28 novembre dernier.
Mais la PPE, c’est le règlement. En renonçant à se doter d’un cadre stratégique législatif, la France sous-estime la nécessité d’une assise politique forte pour conduire dans la durée les changements qu’implique la transformation de notre système énergétique. La France rate ainsi l’occasion de graver dans le marbre les engagements qu’elle a pris au travers de l’accord de Paris pour atteindre la neutralité carbone en 2050.  Par ce choix, elle se met en porte-à -faux vis-à -vis des engagements européens qu’elle a pris en matière de développement des énergies renouvelables, puisqu’elle maintient dans le code de l’énergie des objectifs en-deçà de ceux définis dans la directive RED 3.
Ce renoncement fait peser un doute sur le volontarisme avec lequel le Gouvernement entend aborder la transition énergétique, et ce alors que l’ADEME a chiffré fin 2023 le coût de l’inaction climatique à 10% du PIB, soit 260 milliards d’euros annuels.  Les industriels appelés à mettre en œuvre les investissements considérables nécessaires à la transition énergétique ne peuvent donc pas s’appuyer sur une vision de long terme définie par la représentation nationale.
Curieusement, le gouvernement prévoit un projet de loi pour la protection des consommateurs qui vise l’action des fournisseurs. Mais dans la hiérarchie des insécurités, la première et la plus importante est l’instabilité des prix à laquelle nous expose notre dépendance de plus de 60 % aux énergies fossiles importées. La première façon d’apporter de la sécurité aux consommateurs, c’est de retrouver de la souveraineté énergétique, et cela mérite bien une loi !
« Le gouvernement n’est pas le seul à avoir l’initiative de la loi. La proposition de loi déposée par EELV dans le cadre de leur niche parlementaire a montré qu’un passage législatif était possible. Le SER appelle donc les parlementaires à reprendre ce travail, de façon transpartisane, pour affirmer clairement que la France est bien engagée sur la voie de la neutralité carbone et de la souveraineté énergétique », déclare Jules Nyssen, Président du SER.