L’industrie européenne du photovoltaïque a un goût amer en bouche ce 23 février 2024. L’industriel suisse Meyer Burger vient en effet d’annoncer l’arrêt, mi-mars, de la production de panneaux photovoltaïques sur son site de Freiberg en vue de sa fermeture en avril. Les sirènes de l’IRA (Inflation Reduction Act) sont trop fortes, les Etats-Unis trop attractifs ! Coup dur pour la souveraineté énergétique du continent ! Â
Depuis quelques semaines déjà , le Conseil européen des fabricants solaires (European Solar Manufacturing Council ou ESMC) tire le signal d’alarme et implore la Commission européenne de mettre en place des mesures d’urgence et de soutien face à la vague de panneaux chinois à bas coûts. Serait-il déjà trop tard ? Pour Meyer Burger, en tous les cas, la décision est prise. Dans un communiqué, l’industriel suisse du photovoltaïque est sans équivoque : « Aucune décision n’ayant encore été prise concernant des mesures de soutien visant à remédier aux distorsions actuelles du marché créées par l’offre excédentaire et le dumping des prix des modules solaires, le Groupe a décidé de lancer les préparatifs en vue de la fermeture de son site de Freiberg, qui entrerait en vigueur en avril. Dans un premier temps, le Groupe arrêtera la production sur le site dans la première quinzaine de mars, ce qui devrait se traduire par des économies de coûts significatives à partir d’avril. Les activités de vente en Europe ne sont pas affectées et les clients continueront de bénéficier de garanties complètes sur les produits jusqu’à 30 ans, comme d’habitude ».
Manque de protection européenne contre la concurrence déloyale de la Chine
Sentis Capital Cell 3 PC, le plus grand actionnaire du Groupe qui, à la connaissance du Groupe, détient 10,01% des actions de Meyer Burger, a fait part au Groupe de son intention d’investir jusqu’à CHF 50 millions dans le financement en fonds propres, sous réserve que Meyer Burger décide de l’avenir de ses activités allemandes avant l’AGE de mars. Le montant d’investissement de CHF 50 millions serait atteint en exerçant la totalité des Droits de Souscription de Sentis Capital Cell 3 PC et, pour le montant restant, Sentis Capital Cell 3 PC achèterait des actions supplémentaires dans le cadre de l’Offre pour lesquelles les Droits de Souscription n’ont pas été exercé. Le conseil d’administration de Sentis Capital Cell 3 PC a expliqué : « En raison du manque de protection européenne contre la concurrence déloyale de la Chine, et après de quatre années de travail acharné de grande qualité, il est désolant de constater que des emplois en Europe sont menacées. Le cadre politique américain a prouvé à plusieurs reprises qu’il existe un engagement bipartisan fort pour protéger les entreprises basées aux États-Unis contre la concurrence déloyale. Nous avons également un grand respect et une grande confiance envers les personnes et l’équipe de direction de Meyer Burger. C’est pourquoi Sentis Capital Cell 3 PC, en tant qu’actionnaire, est une fois de plus prête à aider Meyer Burger à réaliser les bénéfices d’une analyse de rentabilisation très profitable aux États-Unis, déjà soutenue par des engagements de retrait à long terme ». L’attentisme et la pusillanimité de la Commission européenne finissent donc par avoir raison de la volonté des investisseurs à soutenir une industrie verte européenne au sein de l’indispensable Transition Energétique, tout en mettant dans le même temps à mal la souveraineté énergétique du continent.
« Une concentration plus claire sur nos activités aux États-Unis nous rend indépendants des décisions politiques en Europe »
Daniel Menzel, Chief Operating Officer de Meyer Burger, a ajouté : « Toute notre expérience issue de l’accélération réussie de la production en Allemagne, de la haute qualité des produits obtenue et des excellents indicateurs de performance clés de production en Allemagne que nous avons réalisés au cours des trois dernières années sera désormais mises à profit pour accélérer le plus rapidement possible la production de modules solaires aux États-Unis afin d’approvisionner rapidement nos clients ». Pour ce faire, Meyer Burger vient d’effectuer une mise à jour importante de son plan, annoncé le 17 janvier dernier, visant à mettre un terme aux pertes soutenues en Europe et à profiter du marché américain très attractif. La mise en Å“uvre de ce plan devrait combler le déficit de financement de 450 millions de CHF, ce qui devrait permettre au Groupe de devenir positif à moyen terme. La Société publiera prochainement une convocation à une Assemblée générale extraordinaire (« AGE ») qui se tiendra le 18 mars 2024 pour approuver une augmentation de capital visant un produit brut de 200 millions de CHF à 250 millions de CHF. L’augmentation de capital devrait inclure l’offre de droits de souscription et d’actions nouvellement émises de la société. Franz Richter, président du conseil d’administration, a déclaré : « Le plan présenté permet à Meyer Burger de capitaliser sur sa position technologique de leader mondial pour favoriser le succès commercial, générer des rendements pour les investisseurs et fournir d’excellents produits à nos clients ». Le Groupe prévoit ainsi d’utiliser le produit de ces sources de financement supplémentaires potentielles, ainsi que le produit de l’augmentation de capital, principalement pour achever son usine de fabrication de cellules solaires à Colorado Springs, Colorado (États-Unis) et son site de fabrication de modules solaires à Goodyear, Arizona. (États-Unis), tous deux actuellement en construction, avec une capacité de production annuelle nominale ciblée d’environ 2 GW chacun. Et Gunter Erfurt, PDG de Meyer Burger, de conclure : « Je suis heureux qu’aujourd’hui nous accomplissions des progrès concrets dans notre approche décrite le 17 janvier. L’augmentation de capital est une proposition attrayante pour nos investisseurs, car ils peuvent investir dans le secteur américain très attractif où nous sommes positionnés pour avoir le potentiel de développer une entreprise rentable. De plus, une concentration plus claire sur nos activités aux États-Unis nous rend indépendants des décisions politiques en Europe ». Comme une épitaphe pour l’industrie photovoltaïque européenne…