Philippe Bourguignon, ancien directeur de recherche chez Engie, vit une retraite active. Il développe depuis plus de quatre ans déjà l’idée d’un éco train qui fonctionnerait au fil du soleil selon le modèle de l’autoconsommation collective en boucle locale, un système voulu en courant continu pour éviter les coûts de conversion. De quoi envisager des trajets domicile-travail à 2g CO2/km par passager, la plus faible empreinte carbone au monde, mais aussi le transport des fruits et légumes des agriculteurs locaux en circuits-courts ! Une initiative innovante, scrutée de près par l’Ademe, dont le premier tronçon pilote de 9 kilomètres devrait voir le jour entre Albi et Saint Juéry en Occitanie en 2023, puis entre Auch et Agen dans une deuxième phase !
L’autoconsommation collective ouvre des horizons sans fin et sans limite en matière de stratégie énergétique. Tel est le leitmotiv de Philippe Bourguignon depuis le début des années 2010. Jusqu’à faire rouler des trains légers et autonomes à l’énergie solaire.
Mettre en avant la valeur d’usage
L’idée est simple et terriblement pertinente. Il existe aujourd’hui sur le territoire français de nombreuses petites lignes de chemins de fer promises à disparition par manque de trafic. Ses lignes existantes sont une richesse. Elles maillent parfaitement le territoire, celui de la ruralité désormais livrée au « tout automobile ». Le long de ces lignes, dans les gares de proximité, Philippe Bourguignon envisage de créer des sortes de structures solaires avec stockage en ombrières sur des parkings ou au-dessus des voies pour alimenter les trains électriques solaires mais aussi quelques voitures électriques dans une optique de combler la problématique du fameux dernier kilomètre. Installés à l’ombre des panneaux solaires, rames de train et voiturettes feront appel à moins de climatisation une fois en fonctionnement. « Mon idée maîtresse sur ce type de projet est de remplacer le prix du marché par une valeur d’usage. Je ne mets pas un prix en face du solaire mais bien un usage apte à séduire diverses clientèles potentielles. Tout en intégrant bien entendu le fait que le photovoltaïque garantit le prix du transport et de l’énergie pendant quarante ans » confie Philippe Bourguignon.
1600 m² de modules PV par train
La solution solaire serra développée par le groupe Amarenco, spécialiste des solutions solaires. La partie « gestion de l’énergie » sera quant à elle développée avec l’IMT d’Albi dans le cadre d’un programme de recherche pour l’AC collective. « Nos calculs montrent qu’avec 1600 m² de surface de modules installés au-dessus des voies par train, nous serons en capacité d’assurer 90% des besoins en énergie pour sa mobilité » poursuit Philippe Bourguignon.  Le transfert d’énergie s’effectuera en mode continue pour éviter les coûts onéreux de conversion. Le reste sera reversé sur le réseau en mode autoconsommation collective au profit des habitations de proximité. De quoi réduire de manière assez substantielle les factures des ménages vivant sur le périmètre de l’opération ! Les paysans pourront également profiter de cette initiative qui fait la part belle aux acteurs du territoire. Des casiers frigorifiques prévus dans cet écosystème logistique/transport du futur permettront le transport de produits frais et souvent bio vers les lieux de consommation. Un plus pour les agriculteurs qui oeuvrent en circuits courts.
8 millions d’euros pour commencer
Quid du train ? Il est à l’étude dans les locaux de la société Socofer, une ETI installée à Tours qui construit des motrices et des rames en petite série depuis plus de 120 ans. Pour coller à sa vocation écolo, la cabine des trains sera conçue en fibre de lin solide et légère, qui dispose d’une faible empreinte carbone. Pour démarrer le projet, Philippe Bourguignon va créer une société de projets avec la Région Occitanie. Pour son lancement, le projet bénéficie d’un financement qui s’ »élève à huit millions d’euros, l’Adme et le plan d’investissement France 2030 étant les principaux contributeurs. Philippe Bourguignon rêve aussi d’une destinée européenne pour son ambitieux projet de mobilité solaire propre. Il est en tous les cas en train de constituer une équipe de choc pour développer le projet et lancer l’aventure entrepreneuriale. Ingénieurs de tous pays ou étudiants en troisième cycle, l’odyssée du train solaire d’Occitanie n’attend que vous…