Scénario négaWatt 2022 : un nouveau scénario au cœur des transitions sociétales

Renouvelant l’exercice prospectif qu’elle mène tous les cinq ans, l’Association négaWatt présentera le 26 octobre son scénario de transition énergétique pour la France. Ajoutant désormais à la question de l’énergie et du climat celle de l’accès aux matières et l’objectif d’un redéploiement industriel, le chemin tracé par négaWatt jusqu’en 2050 fournit une réponse à la hauteur de l’urgence climatique et de la crise écologique. Le scénario négaWatt 2022 atteint la neutralité carbone en 2050 en s’appuyant à 96 % sur des ressources énergétiques renouvelables, tout en réduisant fortement l’extraction de matières premières dans la croûte terrestre. Il est également compatible avec l’objectif -55 % de gaz à effet de serre fixé au niveau européen à l’horizon 2030.

 

Alors que l’État français vient d’être condamné à réparer les conséquences de sa carence en matière de lutte contre le changement climatique, le prochain quinquennat doit être celui de l’action écologique. À l’approche des prochaines élections présidentielles et législatives, loin du renoncement comme de l’illusion de solutions faciles, le volontarisme des propositions de l’Association négaWatt s’ancre dans un réalisme opérationnel pour nourrir le débat. Ces propositions esquissent un projet de société socialement juste et apaisée, respectant les limites physiques de la planète pour offrir à moyen et long terme des conditions de vie décentes à tous nos concitoyens et à leurs descendants. Des mutations en réponse aux enjeux de transition La transition énergétique revêt de multiples aspects qui sous-tendent in fine ce qu’il faut bien appeler une transition sociétale. Grâce à l’expertise et aux retours d’expérience des praticiens de terrain qui contribuent à son élaboration, le scénario négaWatt traduit les objectifs incontournables en mesures concrètes.

 

❶ Améliorer la qualité des logements.

Pour réduire les factures de chauffage et gagner en confort et en santé, l’isolation des logements et locaux tertiaires est une priorité. Les politiques mises en œuvre ces dernières années restent inadaptées, rendant de plus en plus difficile l’atteinte des objectifs fixés à l’échelle nationale. Un grand programme de rénovation performante, au niveau BBC, est à lancer urgemment, en renforçant la formation des professionnels du bâtiment.

 

❷ Rendre la mobilité plus accessible et moins polluante.

Les modes alternatifs de déplacement (train, transports en communs, covoiturage, vélo) et leurs infrastructures doivent être développés pour que tout un chacun puisse disposer d’une vraie offre de mobilité écologique. La baisse du trafic routier se combine avec de nouvelles motorisations : électrification soutenable des véhicules individuels complétée de bioGNV pour les déplacements longue distance, et évolution du transport de marchandises essentiellement vers le bioGNV et partiellement vers l’hydrogène et l’électricité. 1 Y compris en intégrant les émissions dites importées. 2 Les 4 % d’énergies fossiles restantes sont uniquement destinés aux usages matières premières ; les usages énergétiques sont couverts à 100 % par des sources renouvelables. 2/3

 

❸ Développer de nouvelles stratégies industrielles inscrites dans la transition énergétique. Le scénario négaWatt promeut une relance industrielle vertueuse qui combine à la fois des stratégies d’optimisation des ressources (écoconception, réparabilité, recyclage, matières biosourcées, etc.), de développement de filières d’avenir (éolien offshore, batteries pour véhicules électriques, électrolyseurs, etc.) et de relocalisation de productions (textile, photovoltaïque, etc.).

 

❹ Moins et mieux consommer des produits à faible impact environnemental.

Une réflexion sur nos besoins et sur la manière d’y répondre est nécessaire pour atteindre les objectifs de décarbonation et de préservation de l’environnement. Les filières industrielles doivent s’orienter vers des biens plus durables. Cela passe par des produits de qualité, des appareils davantage réparables, une meilleure information sur les produits achetés, des usages plus sobres, etc. La réglementation doit agir en ce sens.

 

❺ Conjuguer agroécologie et alimentation saine.

La mutation du monde agricole amène à sortir du modèle intensif et de l’abus de produits fertilisants et phytosanitaires d’origine fossile. L’agroécologie doit être portée au niveau local, en lien avec la protection de la biodiversité végétale et animale, l’accompagnement des citoyens pour faire évoluer leur régime alimentaire et la production d’énergies renouvelables.

 

❻ Engager le mix énergétique français vers le 100 % renouvelable.

Grâce à la maîtrise des consommations, les besoins en chaleur, en carburants et en électricité de la France peuvent être progressivement assurés par les énergies renouvelables. Sans démarrer l’EPR – échec industriel majeur – ni construire de nouveaux réacteurs nucléaires, et en fermant les anciens entre leurs 40ème et 50ème années d’exploitation, le système électrique peut se passer de l’atome tout en assurant la sécurité d’approvisionnement via le stockage et le pilotage des flexibilités.

 

❼ Acter une nouvelle étape de la décentralisation.

Les gisements de sobriété, d’efficacité et d’énergies renouvelables sont par nature décentralisés, de même que les emplois qui permettent de les mobiliser. En donnant plus de moyens réglementaires, humains et financiers aux collectivités locales, on leur offre la perspective d’un développement écologiquement performant et socialement juste de leurs territoires.

 

Des impacts positifs majeurs

 

La démarche négaWatt repose sur l’application des trois principes de sobriété, d’efficacité et de sources renouvelables à tous les secteurs consommant/produisant de l’énergie et des matériaux. Ce choix conduit à la division par deux de la consommation d’énergie finale en 2050 par rapport à aujourd’hui. Orienté vers l’atteinte des 17 Objectifs de développement durable fixés par les Nations-Unies, le scénario trace une trajectoire positive pour la société et pour l’environnement. Les bilans chiffrés le montrent notamment sur quatre marqueurs essentiels.

 

❶ Les émissions territoriales de gaz à effet de serre (GES) sont divisées par neuf entre 2019 et 2050. L’empreinte carbone de la France diminue également, grâce à la réduction des émissions importées. Les puits de carbone augmentent grâce au développement de pratiques agroécologiques et à une stratégie “zéro artificialisation nette”, permettant l’atteinte de la neutralité carbone.

 

❷ Au moins cinq cent mille emplois sont à créer d’ici une dizaine d’années dans les métiers de la transition énergétique, à condition de la démarrer dès à présent ! La rénovation complète et performante des bâtiments crée à elle seule près de 300 000 emplois, les énergies renouvelables plus de 100 000. D’autres activités comme l’écoconception, le recyclage, la réparation, les services d’efficacité énergétique, l’accompagnement à la sobriété et bien d’autres encore seront aussi source d’emplois, tout comme les relocalisations industrielles. Nouveauté du scénario négaWatt 2022 Empreinte carbone Les émissions “importées”, c’est à dire les émissions de GES engendrées par la fabrication à l’étranger de biens ensuite importés en France, sont désormais comptabilisées dans le scénario négaWatt. 3/3

 

❸ La santé de la population française s’améliore. Trois paramètres sont à considérer : un régime alimentaire plus équilibré (basé sur le scénario Afterres2050), une meilleure qualité de l’air, de l’eau et des sols (baisse des émissions de particules, diminution des émissions d’ammoniac d’origine agricole et des rejets de pesticides et nitrates) et le développement des modes actifs de mobilité. Sur ce dernier point, le moindre usage de la voiture et un plus grand recours à la marche à pied et surtout au vélo, tels qu’ils sont dimensionnés dans le scénario négaWatt, conduisent à éviter 10 000 décès par an entre 2035 et 2050.

 

❹ L’empreinte matière de la France passe de 850 à 600 millions de tonnes de matériaux bruts, réduisant d’autant la pression exercée sur les ressources naturelles. La suppression quasi-totale des énergies fossiles compte pour beaucoup dans cette baisse, de même que le moindre usage de matières minérales rendu possible par la sobriété, le recyclage, etc. L’empreinte biomasse diminue légèrement. Le cuivre, le lithium et le cobalt font partie des matériaux les plus critiques en 2050. À rebours des injonctions à produire et consommer toujours davantage, au mépris des limites planétaires, le scénario négaWatt trace une voie pour réduire les effets du dérèglement climatique tout en améliorant la vie en société. Chaque dixième de degré compte : le temps d’agir est venu en orientant toutes nos politiques sur le chemin de la sobriété, de l’efficacité et des ressources renouvelables, tout en accompagnant les transformations et mutations nécessaires, y compris sur le plan social et économique.

 

L’Association négaWatt propose un événement à Paris le 26 octobre 2021. La matinée rassemblera des acteurs économiques et politiques autour de tables rondes ; l’après-midi sera dédiée à la présentation du scénario négaWatt (invitation en ligne).

negawatt.org/IMG/pdf/synthese-scenario-negawatt-2022.pdf

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