Les professionnels du solaire outre-mer interpellent le premier ministre Jean Castex sur la révision des contrats d’achat

Le Gouvernement a déposé samedi un amendement II-3369 après l’article 54 du PLF 2021 qui vise à réviser les contrats d’achat d’électricité conclus entre 2006 et 2010. Il prévoit le principe d’une réduction des tarifs applicables fixée par voie d’arrêté. En leur qualité d’acteurs de l’économie du photovoltaïque dans les départements et régions d’outremer (DROM), les acteurs de la filière souhaitent particulièrement attirer l’attention du premier ministre Jean Castex sur l’effet dévastateur qu’aura cet amendement sur leurs activités, et de manière plus large sur le financement des énergies renouvelables dans les territoires outre-mer.

 

Ils souhaitent donc que les DROM soient exclus sans ambiguïté du champ d’application de cet amendement. Ce dernier prévoit une clause de sauvegarde qui pourrait permettre, par une appréciation au cas par cas, de déroger à la mesure de réduction prévue par le Gouvernement, selon des conditions qui restent à définir. Mais cette clause de sauvegarde sera difficilement applicable, pour des raisons liées au mode de développement des acteurs dans les départements et régions d’Outre-mer (DROM).

En effet, les flux de trésorerie des contrats visés sont bien souvent mutualisés dans une logique de foisonnement (plusieurs contrats regroupés au sein d’une même société). Dans la plupart des cas, il est ainsi  impossible  d’allouer  projet  par  projet  les  charges  d’exploitation  et  de  qualifier  la  supposée rémunération excessive, ce qui rend la clause de sauvegarde définie par l’amendement insusceptible de s’appliquer.  C’est précisément ce foisonnement qui permet de financer la croissance des acteurs et le maintien dans l’emploi de leurs équipes. Il est rendu nécessaire par l’absence de visibilité des acteurs des DROM sur leur développement, car contrairement à la métropole :

 

- Aucun appel d’offres n’est annoncé dans ces territoires pour 2021 ni pour les années suivantes, alors que 10 GW sont prévus en métropole sur les 5 prochaines années ;

-  Le  marché  y  est  plus  étroit,  et  les  mesures  favorables  annoncées  par  le  Gouvernement  avec  le rehaussement du guichet tarifaire permettant de soutenir des installations sur toiture allant jusqu’à 500 kW au lieu de 100 kW actuellement ne s’appliquent pas dans les DROM, qui font, donc, déjà l’objet d’un traitement discriminatoire défavorable.

La remise en cause des contrats d’achat conclus en 2006 et 2010 aura mécaniquement pour effet de priver les producteurs de la rémunération nécessaire pour assurer la couverture de l’ensemble de leurs charges fixes, notamment leurs charges salariales. Elle les conduira très probablement à devoir licencier les personnels dont les coûts ne peuvent pas être imputés sur des projets non garantis.

Le dispositif prévu par le gouvernement dans son amendement aboutira également à rendre plus difficiles et plus coûteux les financements bancaires. Des établissements bancaires ont d’ores et déjà fait part de leur décision de se retirer d’un certain nombre de projets en cours. D’autres ont fait savoir qu’ils demanderaient une révision des conditions de leurs prêts.  Ceci est d’autant plus dommageable, dans un tel contexte de crise économique et sociale par ailleurs,

que  la  filière  photovoltaïque  est  l’une  des  filières  d’excellence  de  l’économie  des  DROM  :  le photovoltaïque  représente  par  exemple  27%  de  la  production  d’électricité  renouvelable  à  La Réunion. Tous  DROM  confondus,  il  est  estimé  qu’environ  220  MW  seront  concernés  par  la mesure, soit plus de 50% du parc installé, contre 0,5% avancés par le Gouvernement à l’échelon national. Le  Gouvernement  n’a  pas  procédé  à  l’étude  d’impact  de  la  mesure  envisagée  pour  les  territoires ultramarins.  Hors  il  y  a  une  disproportion  manifeste  entre  l’effet  budgétaire  recherché  et  les conséquences économiques et sociales désastreuses que la mesure entraînerait dans les DROM.

Aussi, compte tenu à la fois de l’inapplicabilité de la clause de sauvegarde dans ces territoires du fait de leurs spécificités, et des effets qui en résulteraient pour l’attractivité économique des DROM, il semble indispensable aux acteurs de la filière de “sanctuariser les DROM” afin que la dynamique d’investissements dans les énergies renouvelables outre-mer ne soit pas grippée par l’effet contagion de la remise en cause de la parole de l’Etat. Et les producteurs et acteurs du photovoltaïque dans les DROM d’en appeler à une mobilisation contre cet amendement…

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