ENERPLAN: «Nous aurons le niveau de tarif d’achat allemand avec la complexité administrative française »

« On va avoir le niveau de tarif d’achat allemand avec la complexité administrative française », déclare lundi 7 mars 2011 à AEDD Richard Loyen, délégué général d’Enerplan, en réaction à la parution deux jours plus tôt au Journal officiel de deux arrêtés fixant le nouveau cadre tarifaire photovoltaïque. Les nouveaux tarifs sont inférieurs de 20 % en moyenne à ceux en vigueur avant le moratoire de décembre 2010, et ne concernent plus que les installations de puissance inférieure ou égale à 100 kilowatts crête. Ils entrent en vigueur à compter du jeudi 10 mars prochain, lendemain de la fin d’une période de trois mois de suspension des tarifs d’achat. « Aujourd’hui, les amortisseurs de décroissance de la filière viennent des collectivités », affirme Richard Loyen.
Pour Ariane Vennin, porte-parole d’ESF (Ecologie sans frontière), le nouveau cadre de régulation du photovoltaïque « n’inspire qu’indignation aux professionnels du secteur ». Réunis au sein du collectif Touche pas à mon panneau solaire, ils prévoient d’aller manifester demain à midi devant le palais de l’Elysée, à Paris. « Aucune des propositions issues de la concertation Charpin n’a été prise en compte », observe Ariane Vennin.
« Que ce soit sur les appels d’offre, sur les tarifs, sur les segments : cela n’a servi à rien. Nous sommes revenus au projet du rapport Charpin d’août 2010. Même la régionalisation des tarifs a été supprimée. Il sera à nouveau beaucoup plus rentable de faire des projets solaires dans le sud que dans le nord. » Pour la porte-parole d’ESF, « on va mettre en place une armée de fonctionnaires pour faire des appels d’offre sur des projets de 100 kilowatts, soit la consommation électrique de 60 personnes ! »

APPELS D’OFFRE « NON MENTIONNÉS »

« Je ne sais pas comment vont faire les électriciens pour comprendre » le nouvel arrêté, estime Richard Loyen. « Avant, il ne fallait pas avoir fait Polytechnique » pour comprendre les tarifs. « C’est regrettable et non transparent ». Le délégué général d’Enerplan indique que l’arrêté « ne mentionne pas les appels d’offre » pour les installations de plus de 100 kilowatts : « On aurait mieux fait de réfléchir à cette procédure plutôt que de perdre trois mois en concertation ». Il remarque aussi que le quota annuel d’autorisation de raccordement de 500 mégawatts « n’est pas affiché comme tel » dans le texte, mais « existe de fait ».

En effet, la baisse de 10 % par an des tarifs d’achat souhaitée par le gouvernement « est calibrée () si l’objectif de 100 mégawatts est atteint distinctement sur chacun des deux segments de marché concernés par les tarifs (résidentiel, santé et enseignement / autres bâtiments) », explique le Cler (Comité de liaison des énergies renouvelables). « Elle sera plus importante, voire beaucoup plus importante, si le rythme est supérieur, pouvant aller jusqu’à 9,5 % de baisse trimestrielle si la puissance installée est supérieure à 65 mégawatts. Ramené sur une année, si plus de 200 mégawatts sont installés dans le résidentiel, santé et enseignement, la baisse sera de 22 %. Cette baisse serait même, si le volume annuel d’installations dépassait 260 mégawatts, de 33 % après un an ».

« FAUTE DE FRAPPE »

Raphaël Claustre, directeur du Cler, relève « une faute de frappe dans l’arrêté » : les nouveaux tarifs n’y sont pas précisés, alors qu’ils figuraient dans l’un des projets de texte transmis mercredi 23 février aux parties prenantes de la concertation (L’AEDD n°9476). Selon ce projet de texte, le tarif le plus élevé devait aller aux installations de moins de neuf kilowatts intégrées au bâti dans le secteur résidentiel (46,4 centimes d’euros le kilowattheure), le moins élevé aux installations avec intégration simplifié au bâti des « autres bâtiments » de 36 à 100 kilowatts (28,85 centimes d’euros le kilowattheure). Un tarif pour « tout type d’installation » de moins de 12 mégawatts est également établi, à 12 centimes d’euros le kilowattheure.

Pour Enerplan, « le rôle des collectivités sera sans nul doute déterminant dans les prochains mois, pour corriger la trajectoire nationale qui tire le photovoltaïque français vers le bas ». « Le lancement d’appel d’offres par les collectivités sera le meilleur moyen de se sortir de la volonté affichée du gouvernement d’étouffer la filière », affirme Richard Loyen.

Or, « le gouvernement fait aussi l’impasse sur les projets des collectivités locales », constate l’ARF (Association des régions de France). Soumis aux contraintes des marchés publics, ces projets dont le modèle économique ne tient plus, auront beaucoup de mal à voir le jour et sont aujourd’hui à l’arrêt ». L’association de collectivités juge, elle aussi, que « la concertation organisée par le gouvernement n’aura pas eu de réelle influence sur une réforme déjà ‘ficelée’ d’avance ». « Alors que les régions co-élaborent en ce moment, avec l’Etat, les [SRCAE] schémas régionaux climat air énergie, qui doivent traduire la mise en Å“uvre des dispositions du Grenelle dans les territoires, cette nouvelle réglementation, rigide et complexe, est un mauvais signal pour la suite. »

D’après une dépêche de l’AEDD.

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