Le 5 octobre dernier la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblé Nationale a reçu M. Jean-François Carenco, directeur de cabinet de M. Jean-Louis Borloo. L’occasion pour celui-ci de répondre aux interrogations des députés. Nous reproduisons ci-dessous les passages qui traitent des questions relatives au photovoltaïque
M. Stéphane Demilly (Député de la Somme. Nouveau centre):
Quel est le résultat de l’appel d’offres lancé en 2009 par la Commission de régulation de l’énergie, la CRE, pour la construction de fermes solaires ? Alors que la date limite de dépôt des candidatures avait été fixée au 24 janvier 2010, le MEEDDM n’a toujours pas fait connaître sa décision. Or ces dossiers ont généré de nombreuses études, des prêts pour la constitution de réserves foncières, des accords avec des écoles, etc. Quand le ministère compte-t-il donner la liste des gagnants de cet appel d’offres ?
M. Jean-François Carenco (Directeur de cabinet de M. Jean-Louis Borloo):
Les candidats à l’appel d’offres de la CRE ont exagéré : alors que l’objectif d’un appel d’offres est normalement d’obtenir un prix inférieur au tarif existant, tous proposaient des prix supérieurs de 20 % ! C’est pourquoi j’ai proposé au ministre d’État de déclarer cet appel d’offres infructueux. []
En ce qui concerne la production d’énergies renouvelables en général, la contribution au service public de l’électricité, ou CSPE, est aujourd’hui de 4,50 euros le mégawatt-heure, soit environ 4 % du prix payé par le consommateur final. ceux qui nous donnent en exemple le niveau de production d’énergies renouvelables atteint en Allemagne, je rappelle que dans ce pays, la taxe équivalente à la CSPE représente 20 % du prix payé par le consommateur final : cela reviendrait donc à augmenter de 16 % le prix de l’électricité en France, ce que le Gouvernement refuse pour l’instant. []
Quant à l’électricité photovoltaïque, elle fait l’objet de trois tarifs de rachat. Le Gouvernement a décidé de ne pas toucher au tarif de rachat, particulièrement rentable, du photovoltaïque produit par des panneaux intégrés au bâti, ces installations produisant peu d’énergie mais beaucoup d’emplois. Dans cette hypothèse, le crédit d’impôt en faveur du développement durable risque de passer de 800 millions d’euros à 1,6 milliard d’euros l’an prochain, ce qui n’est pas possible. Le tarif de rachat de l’électricité produite par des panneaux simplement posés au sol est le moins élevé. L’inconvénient de ces installations est qu’elles sont grandes consommatrices de terres agricoles. Afin de protéger ces terres, un des décrets prioritaires confie au préfet la responsabilité de la délivrance du permis de construire.
Ce verrou s’ajoute au premier verrou posé par la loi de modernisation agricole. Nous avons suffisamment de friches et d’anciens terrains militaires pour assurer le développement de cette énergie. Notre ambition est de réguler cette production par le volume, et non par le prix. Il s’agit aussi de préserver l’industrie photovoltaïque française. Entre parenthèses, si les 700 emplois de la société Photowatt, par exemple, sont préservés, c’est grâce aux prescriptions techniques que nous avons imposées par voie d’arrêté : sans elles, c’est du matériel chinois qu’on retrouverait sur nos toits !
Le tarif intermédiaire, applicable à la production des panneaux installés sur le toit de grandes surfaces ou d’exploitations agricoles, est plus discutable. Je le dis clairement : la CSPE n’a pas vocation à subventionner la grande distribution en finançant des ombrières de parking.
M. François Grosdidier (Député de Moselle. UMP):
Comment écarter la grande distribution ?
M. Jean-François Carenco:
Nous cherchons encore la solution.
Mme Françoise Branget (Députée de Saône-et-Loire. UMP):
Après la baisse de 12 % au 1er septembre des tarifs de rachat des installations de solaire photovoltaïque, une rumeur court selon laquelle une nouvelle baisse interviendrait au 1er janvier. Qu’en est-il ?
Par ailleurs, le nombre d’emplois engendrés par les installations photovoltaïques a-t-il été estimé, de même que le montant de TVA perçu ?
M. Jean-François Carenco:
S’agissant du photovoltaïque de toiture, méfions-nous des rumeurs lesquelles ne bénéficient finalement qu’aux spéculateurs. Un tarif existe : il s’appliquera jusqu’au jour où il ne s’appliquera plus… En tout cas, nous avons la conviction qu’en maintenant le tarif en la matière et en baissant de moitié le crédit d’impôt, non seulement nous ne tarirons pas le flux, mais nous continuerons de développer l’emploi dans ce domaine. Alors que les coûts des composants ont baissé de 40 % en deux ans, pourquoi seule la « nation CSPE » contribution au service public de l’électricité devrait être la seule à ne pas profiter de cette baisse ? Il faut une répartition qui concerne également les fabricants, les locataires de l’espace et les intermédiaires.
Mme Françoise Branget: Un souci n’en demeure pas moins concernant les installations programmées pour lesquelles les particuliers ont déposé des déclarations de travaux.
M. Jean-François Carenco: Ils gagneront simplement moins d’argent.
Mme Françoise Branget: Mais cela met également en difficulté les entreprises. Selon vos estimations, 850 mégawatts auront été installés en 2010 contre 85 en 2008. Les professionnels ne sont apparemment pas d’accord sur ces chiffres.
M. Jean-François Carenco: Je me fonde sur les raccordements à ERDF et à RTE. En tout cas, je ne crois pas que les particuliers soient nombreux à être mis en difficulté s’agissant des installations programmées.
M. le président Christian Jacob (Député de Seine-et-Marne. UMP): Nous reviendrons en tout état de cause sur ce point lors de l’examen du projet de loi de finances.
M. Philippe Tourtelier (Député de Loire-Atlantique. Socialiste):
[] Pour ce qui est des énergies renouvelables, je rappelle que la CSPE est payée par tous les consommateurs finaux d’électricité alors que dans d’autres pays, c’est le producteur qui finance.
M. Jean-François Carenco: C’est bien pourquoi j’ai parlé de «nation CSPE ».
M. Philippe Tourtelier: Concernant le solaire photovoltaïque, j’ai cru comprendre que vos services préféraient réguler par le volume plutôt que par les prix.
M. Jean-François Carenco: Pour ce qui est des installations au sol.
M. Philippe Tourtelier: En la matière, ce sont les gros producteurs qui vont s’en sortir et pas les petits. Un chef d’entreprise employant 50 salariés me disait ainsi hier que le fait de se procurer les panneaux solaires en Allemagne de préférence à la Chine afin de bénéficier d’une meilleure garantie lui coûtait 10 à 15 % de son bénéfice. Selon lui, il ne pouvait s’en sortir qu’avec une régulation type rapport Charpin, lequel prévoyait une régulation par «corridor cible» de marché avec dégressivité trimestrielle automatique en fonction des volumes, ce qui n’est pas tout à fait une régulation par des quotas.